L'opposition russe organise une nouvelle manifestation samedi à Moscou pour exiger des élections libres, défiant les autorités qui ont multiplié les menaces et les pressions cette semaine en emprisonnant notamment tous les meneurs de la contestation.
La manifestation, non autorisée, se déroule sans leader puisque les condamnations se sont multipliées depuis l'action de protestation le week-end dernier dans la capitale russe, qui s'est soldée par près de 1.400 interpellations, du jamais vu depuis le retour du président Vladimir Poutine au Kremlin en 2012.

Dernière opposante d'envergure encore en liberté, Lioubov Sobol, une avocate de 31 ans, a été interpellée quelques minutes avant le début de la manifestation, pour laquelle les autorités ont installé des barrières sur les principaux boulevards du centre et déployé d'importants effectifs de policiers et de soldats de la Garde nationale. Le réseau internet mobile était indisponible dans plusieurs zones de la ville.
"La Commission électorale ne fait pas son travail, les tribunaux ne font pas leur travail. La seule chose qui fonctionne, c'est la rue", a déclaré sur Twitter Mme Sobol à la veille de son arrestation. En grève de la faim depuis trois semaines, elle a jusqu'ici échappé à la prison du fait qu'elle a un enfant en bas âge.
Le principal opposant au Kremlin, le blogueur anticorruption Alexeï Navalny, purge pour sa part depuis le 24 juillet une peine de 30 jours de prison. Hospitalisé le week-end dernier pour une "grave réaction allergique" avant d'être renvoyé en cellule, il s'est adressé à la justice pour un possible "empoisonnement".

La plupart de ses alliés et des autres meneurs de la contestation ont eux aussi écopé de courtes peines de détention, à commencer par plusieurs candidats de l'opposition refoulés des élections locales de septembre tels qu'Ilia Iachine, Ivan Jdanov et Dmitri Goudkov.
Accentuant encore la pression d'un cran avant la manifestation de samedi, la justice a inculpé plusieurs personnes dans le cadre d'une enquête pour "troubles massifs", une accusation lourde qui fait planer la menace de peines allant jusqu'à 15 ans de prison.
Cinq d'entre elles, dont des avocats travaillant pour des ONG de défense des droits civiques, ont été placés en détention provisoire vendredi dans l'attente de leurs procès.
La police a pour sa part appelé à renoncer à la manifestation, promettant de "réagir immédiatement". Le maire de Moscou loyal au Kremlin, Sergueï Sobianine, a mis en garde l'opposition contre toute "nouvelle provocation".
- Elections de septembre -

La contestation a démarré après le rejet des candidatures indépendantes aux élections locales du 8 septembre, qui s'annoncent difficiles pour les candidats soutenant le pouvoir dans un contexte de grogne sociale.
Il s'agit de l'un des mouvements de protestation les plus importants depuis les manifestations contre le retour au Kremlin de Vladimir Poutine, sévèrement réprimées en 2012. Les autorités semblent cette fois déterminées à tuer dans l'oeuf toute contestation.
Jeudi, le Fonds de lutte contre la corruption d'Alexeï Navalny a répliqué en accusant dans une enquête l'adjointe du maire de Moscou, Natalia Sergounina, d'avoir détourné des milliards de roubles d'argent public dans la gestion du parc immobilier de la mairie.

Selon l'opposition, la détermination des autorités à barrer l'entrée de ses candidats au Parlement de Moscou lors du scrutin du 8 septembre s'explique par le fait qu'ils pourraient découvrir et dénoncer en cas de victoire les nombreux circuits de corruption et de détournement dans la gestion d'une ville au budget annuel faramineux de 38 milliards d'euros.
Après une première manifestation durement réprimée le week-end dernier, les tribunaux russes ont placé 88 personnes en détention provisoire et condamné 332 autres à des amendes. Trois enquêtes pour "violences" à l'encontre de la police ont été lancées, un délit passible de cinq ans de prison.
AFP