Cet article a été écrit il y a bientôt 10 mois. Après avoir longtemps hésité, je le publie aujourd’hui traduit en arabe pour que les autorités arabisantes compétentes puissent le lire car il s’agit d’un problème du code du statut personnel mauritanien en matière de mariage puisqu’il y est écrit que cela doit se faire selon le rite malikite or tel qu’il est codifié en Mauritanie, il contraint le cadi, l’imam et les futurs époux à faire usage de faux quand il s’agit d’une étrangère chrétienne européenne…
Après cet article il m’a fallu près de 10 mois pour enregistrer biométriquement un mariage établi par le cadi de Tayarett en personne après des semaines de procédure…
Large extrait : « Ce fut un parcours du combattant car je voulais faire les choses suivant les règles les plus strictes vu qu’il s’agit d’un mariage avec une étrangère afin d’éviter ensuite toutes formes de tracasseries administratives qui sont légion par les temps qui courent... L’acte administratif a été supervisé et signé sous la haute autorité du cadi de Teyarett après questions et documents qui ont fait la navette via DHL entre la Mauritanie et l’Italie, le tout traduit par des traducteurs agréés en Mauritanie.
Tout ça à cause d’un problème majeur que j’ai soulevé et qu’il a fallu régler pour éviter le faux et l’usage de faux, à savoir celui du tuteur car selon le code du statut personnel mauritanien, suivant un hadith du prophète PSL « pas de mariage sans tuteur » (Article 9) sachant que selon la jurisprudence sunnite seuls les hanafites, à part pour une femme impubère, permettent à une femme de se marier sans tuteur, toutes les autres écoles du sunnisme réclament un tuteur sauf si la femme a déjà été mariée.
La question est aussi de savoir en Mauritanie quel est le statut accordé aux autres écoles du sunnisme. Leurs rites sont-ils licites ou illicites ? On se demande parfois à propos des divisions, comment les sunnites et les chiites ne cherchent pas une solution pour retrouver l’union face à des versets comme les 52 et 53 de la sourate 23 pour ne citer que ceux-là :
« S23:V52 : Cette communauté, la vôtre, est une seule communauté, tandis que Je suis votre Seigneur. Craignez-Moi donc».
« S23:V53 : Mais ils se sont divisés en sectes, chaque secte exultant de ce qu’elle détenait. »
En arrivant chez l’imam qui m’a envoyé ensuite m’informer chez le Cadi, j’ai expliqué que ce serait mentir que de dire que la promise majeure a un tuteur car dans son pays, l’Italie, comme dans la majorité des démocraties modernes, une femme sitôt majeure n’a plus de tuteur si elle est saine d’esprit.
Même son père n’a pas le droit de se présenter comme son tuteur, il ne peut être que son témoin.
Cela dit, ayant lu le code du statut personnel mauritanien, je sais ce que vaut le tuteur par rapport au Cadi car vu que le mariage ne peut se faire sans la volonté de la femme, le tuteur est obligé d’accepter à moins de raisons valables et s’il refuse, le Cadi peut l’obliger sinon le Cadi autorise le mariage. (Article 13)
http://droit-afrique.com/upload/doc/mauritanie/Mauritanie-Code-2001-statut-personnel.pdf
Notre parcours du combattant a commencé chez un imam sélectionné pour sa bonne foi sans concession. Dès qu’il a entendu qu’il n’y a pas de « weli » (tuteur), il n’a plus rien voulu entendre et nous envoya chez le Cadi du Ksar pour profiter de sa science et suivre ses instructions. Avant d’y aller, nous avons consulté quelqu’un de fin afin de savoir comment présenter les choses de la façon la plus efficace. Le consultant nous rappelle que le Cadi voit à longueur de journée mille personnes qui entrent et sortent chacun racontant son affaire, ce qui ne lui permet pas toujours une stabilité d’approche à la première audience, ce qui l’oblige parfois à faire revenir plusieurs fois les citoyens jusqu’à compréhension pleine et entière des faits présentés après le temps de la réflexion et de l’analyse.
Pour éviter au Cadi cette gymnastique, il fut convenu de lui écrire en arabe une lettre de la part de la promise lui expliquant la situation : elle est italienne, majeure, des gens du Livre, chez elle, il n’y a pas de tuteur pour les citoyens majeurs sains d’esprit. En plus, le consultant nous explique que la demande de mariage doit venir d’elle, dépossédant le promis que je suis de la posture virile en pareille occasion et m’obligeant à assister aux débats en baissant les yeux. Et pour finir, elle demande au Cadi d’être son tuteur ou de lui choisir un tuteur afin de respecter le rite sunnite malikite en vigueur en Mauritanie.
Le Cadi du Ksar nous reçoit avec beaucoup d’intérêt et surtout de curiosité car son greffier en chef l’a briefé avant qu’on entre. Il est un peu bilingue, comprend et parle un français intelligible et assure qu’il a été 14 jours en Italie mais que ce ne fut pas suffisant, dit-il avec humour, pour apprendre l’italien. Ça commence bien, le Cadi est charmant. Au moment où il veut se lancer dans ses questions à tiroirs sachant que tout cela ouvrira le bal des convocations à n’en plus finir pour mieux comprendre et prendre le temps de se renseigner, nous lui tendons la lettre qui explique tout et raccourcit les rendez-vous futurs.
Un imperceptible froncement de sourcils associé à un frémissement des joues et d’un pli du front nous apprennent qu’il a compris qu’on veut le priver de son habituel exercice de remise à plus tard avant de trancher. Cependant, en bon Cadi imperturbable et toujours de bonne mine pour rendre des jugements en toute sérénité, il lut attentivement le texte écrit avec un arabe ndeymanien où la flatterie est subliminale et l’appel à prendre ses responsabilités, de Cadi, implacable.
Avant de parler, il respira un bon coup pour justement encaisser le coup maraboutique de l’auteur de la lettre au nom de la promise parfaitement au courant de la teneur des propos grâce au traducteur qui suit cette affaire depuis le premier jour. Puis Le cadi sourit comme un bon père de famille en disant à propos de l’invitation à être le tuteur « hada me te’a’deul hateu » ce qui signifie que tout ça est très noble. Mais comme pareille introduction implique souvent un « mais » impossible pour lui d’articuler sans transition de peur de donner l’air de fuir sur-le-champ ses responsabilités de musulman et de Cadi, il commença en prenant son vieux greffier en chef comme témoin, comme si je n’étais pas si savant, par réciter les versets du coran qui autorisent un musulman à épouser une femme des gens du Livre et pour verrouiller le tout il donna des exemples dans le comportement du prophète psl face aux gens du Livre.
Le greffier en chef, personnage simple et profond, amateur à la pause déjeuner de pain au beurre et ennemi déclaré des plats épicés qu’il craint un peu moins que le diable, acquiesce de la tête en écoutant le Cadi qui sait bien qu’il ne lui apprend rien et le greffier de terminer à voix basse les récitations du Cadi comme c’est l’usage pour montrer qu’on est tout aussi éduqué. Puis à propos du fait qu’en Italie, les femmes majeures n’ont pas de tuteur, le Cadi sourit en disant de façon maraboutique à son greffier « tu vois ils sont démocrates ». A entendre le ton délicieux du Cadi cela pourrait passer pour un compliment, mais pour qui connaît l’humour maraboutique, il peut aussi signifier « voilà où mène la démocratie ».
C’est ensuite que les choses se gâtent un peu et ressemblent à des tracasseries déguisées en facilités présumées acquises pour revenir à l’habitude du Cadi à renvoyer à plus tard le moment de trancher et rendre le coup à la fameuse lettre maraboutique implacable qu’il vient de lire.
Le Cadi annonce qu’il est parfaitement prêt à faire tout ce qu’il faut car tout cela lui semble correct mais qu’il n’est pas imam aussi avant de nous envoyer chez l’imam avec ses instructions, il réclame quelques papiers faciles à trouver :
1-D’abord un numéro d’identification en Mauritanie de la promisse. On lui explique que pour l’instant elle n’a qu’un visa en règle car elle a fait le voyage pour se présenter en personne au mariage même s’il paraît qu’en islam ce n’est pas une obligation, un tuteur ou n’importe qui avec une procuration fait l’affaire. Le Cadi plus conciliant que jamais, demande juste le numéro de demande d’immatriculation même si ensuite c’est refusé, l’essentiel étant le numéro. On n’insiste pas surtout vu que la demande vient de la femme, je n’ai rien à dire. Le Cadi a parfaitement raison, aujourd’hui pour enregistrer biométriquement un mariage à l’état-civil, il faut à la femme une carte de résidente. Incroyable mais vrai. Ainsi on n’a pas le droit de vivre où l’on veut en se mariant d’abord chez soi ni d’épouser une femme qui travaille ailleurs comme tous ces mauritaniens qui épousent une femme au pays puis vont gagner leur vie en Angola. Il faut là encore faire usage de fausse résidence pour contourner l’absurde surtout que même sans enregistrement biométrique le mariage enregistré chez Cadi est reconnu par l’état.
2-Ensuite le Cadi a demandé d’aller dans son ambassade ou faire venir d’Italie un certificat de célibat. On lui a expliqué qu’il n’y a pas d’ambassade d’Italie établie en Mauritanie mais que le document est trouvable en Italie.
3- Et enfin et c’est là l’unique faiblesse du Cadi face à ses responsabilités vu que la lettre lui demande d’être le tuteur ou de choisir un tuteur honorable, il a préféré demander n’importe quel italien de la même confession qu’elle. Sans rien dire, étant moi-même un maure, j’ai trouvé cela bien humiliant que de demander d’aller chercher n’importe quel inconnu pourvu qu’il soit italien surtout que les italiens ne courent pas les rues ici et au nom de quoi faudrait-il en alpaguer un dans la rue ou faire une annonce publique pour expliquer qu’on recherche d’urgence un italien car une compatriote est otage de la procédure d’un cadi qui réclame n’importe quel italien pour la procédure de mariage suivant les règles islamiques en vigueur en Mauritanie ? Tout cela n’est pas sérieux.
J’ai su à cet instant que ce charmant Cadi ne me reverrait plus de sitôt car si c’est pour lui amener n’importe qui, je l’aurais fait avec n’importe quel imam du coin auquel ma bonne foi présumée eût suffi comme c’est souvent le cas.
Nous avons remercié le Cadi après qu’il ait terminé ses réclamations par un sincère « bienvenue en Mauritanie » et nous sommes sortis en lui assurant que nous allons essayer de lui trouver le numéro d’immatriculation en Mauritanie même si la promise n’habite pas là ( sic ! ) , le certificat de célibat et l’italien de bonne foi si on en trouve un.
Complètement découragé et un peu honteux devant la promise de lui montrer la légèreté avec laquelle notre système prend en compte des affaires censées être sérieuses au nom de la religion, je n’avais plus que le choix de renoncer à me marier dans les règles chez moi sans faux et usage de faux en matière de tuteur ou retourner à la case de départ et jouer le jeu hypocrite l’essentiel étant d’obtenir gain de cause face à l’administration qui n’en est pas à une contradiction près.
Tout ça à cause d’un problème majeur que j’ai soulevé et qu’il a fallu régler pour éviter le faux et l’usage de faux, à savoir celui du tuteur car selon le code du statut personnel mauritanien, suivant un hadith du prophète PSL « pas de mariage sans tuteur » (Article 9) sachant que selon la jurisprudence sunnite seuls les hanafites, à part pour une femme impubère, permettent à une femme de se marier sans tuteur, toutes les autres écoles du sunnisme réclament un tuteur sauf si la femme a déjà été mariée.
La question est aussi de savoir en Mauritanie quel est le statut accordé aux autres écoles du sunnisme. Leurs rites sont-ils licites ou illicites ? On se demande parfois à propos des divisions, comment les sunnites et les chiites ne cherchent pas une solution pour retrouver l’union face à des versets comme les 52 et 53 de la sourate 23 pour ne citer que ceux-là :
« S23:V52 : Cette communauté, la vôtre, est une seule communauté, tandis que Je suis votre Seigneur. Craignez-Moi donc».
« S23:V53 : Mais ils se sont divisés en sectes, chaque secte exultant de ce qu’elle détenait. »
En arrivant chez l’imam qui m’a envoyé ensuite m’informer chez le Cadi, j’ai expliqué que ce serait mentir que de dire que la promise majeure a un tuteur car dans son pays, l’Italie, comme dans la majorité des démocraties modernes, une femme sitôt majeure n’a plus de tuteur si elle est saine d’esprit.
Même son père n’a pas le droit de se présenter comme son tuteur, il ne peut être que son témoin.
Cela dit, ayant lu le code du statut personnel mauritanien, je sais ce que vaut le tuteur par rapport au Cadi car vu que le mariage ne peut se faire sans la volonté de la femme, le tuteur est obligé d’accepter à moins de raisons valables et s’il refuse, le Cadi peut l’obliger sinon le Cadi autorise le mariage. (Article 13)
http://droit-afrique.com/upload/doc/mauritanie/Mauritanie-Code-2001-statut-personnel.pdf
Notre parcours du combattant a commencé chez un imam sélectionné pour sa bonne foi sans concession. Dès qu’il a entendu qu’il n’y a pas de « weli » (tuteur), il n’a plus rien voulu entendre et nous envoya chez le Cadi du Ksar pour profiter de sa science et suivre ses instructions. Avant d’y aller, nous avons consulté quelqu’un de fin afin de savoir comment présenter les choses de la façon la plus efficace. Le consultant nous rappelle que le Cadi voit à longueur de journée mille personnes qui entrent et sortent chacun racontant son affaire, ce qui ne lui permet pas toujours une stabilité d’approche à la première audience, ce qui l’oblige parfois à faire revenir plusieurs fois les citoyens jusqu’à compréhension pleine et entière des faits présentés après le temps de la réflexion et de l’analyse.
Pour éviter au Cadi cette gymnastique, il fut convenu de lui écrire en arabe une lettre de la part de la promise lui expliquant la situation : elle est italienne, majeure, des gens du Livre, chez elle, il n’y a pas de tuteur pour les citoyens majeurs sains d’esprit. En plus, le consultant nous explique que la demande de mariage doit venir d’elle, dépossédant le promis que je suis de la posture virile en pareille occasion et m’obligeant à assister aux débats en baissant les yeux. Et pour finir, elle demande au Cadi d’être son tuteur ou de lui choisir un tuteur afin de respecter le rite sunnite malikite en vigueur en Mauritanie.
Le Cadi du Ksar nous reçoit avec beaucoup d’intérêt et surtout de curiosité car son greffier en chef l’a briefé avant qu’on entre. Il est un peu bilingue, comprend et parle un français intelligible et assure qu’il a été 14 jours en Italie mais que ce ne fut pas suffisant, dit-il avec humour, pour apprendre l’italien. Ça commence bien, le Cadi est charmant. Au moment où il veut se lancer dans ses questions à tiroirs sachant que tout cela ouvrira le bal des convocations à n’en plus finir pour mieux comprendre et prendre le temps de se renseigner, nous lui tendons la lettre qui explique tout et raccourcit les rendez-vous futurs.
Un imperceptible froncement de sourcils associé à un frémissement des joues et d’un pli du front nous apprennent qu’il a compris qu’on veut le priver de son habituel exercice de remise à plus tard avant de trancher. Cependant, en bon Cadi imperturbable et toujours de bonne mine pour rendre des jugements en toute sérénité, il lut attentivement le texte écrit avec un arabe ndeymanien où la flatterie est subliminale et l’appel à prendre ses responsabilités, de Cadi, implacable.
Avant de parler, il respira un bon coup pour justement encaisser le coup maraboutique de l’auteur de la lettre au nom de la promise parfaitement au courant de la teneur des propos grâce au traducteur qui suit cette affaire depuis le premier jour. Puis Le cadi sourit comme un bon père de famille en disant à propos de l’invitation à être le tuteur « hada me te’a’deul hateu » ce qui signifie que tout ça est très noble. Mais comme pareille introduction implique souvent un « mais » impossible pour lui d’articuler sans transition de peur de donner l’air de fuir sur-le-champ ses responsabilités de musulman et de Cadi, il commença en prenant son vieux greffier en chef comme témoin, comme si je n’étais pas si savant, par réciter les versets du coran qui autorisent un musulman à épouser une femme des gens du Livre et pour verrouiller le tout il donna des exemples dans le comportement du prophète psl face aux gens du Livre.
Le greffier en chef, personnage simple et profond, amateur à la pause déjeuner de pain au beurre et ennemi déclaré des plats épicés qu’il craint un peu moins que le diable, acquiesce de la tête en écoutant le Cadi qui sait bien qu’il ne lui apprend rien et le greffier de terminer à voix basse les récitations du Cadi comme c’est l’usage pour montrer qu’on est tout aussi éduqué. Puis à propos du fait qu’en Italie, les femmes majeures n’ont pas de tuteur, le Cadi sourit en disant de façon maraboutique à son greffier « tu vois ils sont démocrates ». A entendre le ton délicieux du Cadi cela pourrait passer pour un compliment, mais pour qui connaît l’humour maraboutique, il peut aussi signifier « voilà où mène la démocratie ».
C’est ensuite que les choses se gâtent un peu et ressemblent à des tracasseries déguisées en facilités présumées acquises pour revenir à l’habitude du Cadi à renvoyer à plus tard le moment de trancher et rendre le coup à la fameuse lettre maraboutique implacable qu’il vient de lire.
Le Cadi annonce qu’il est parfaitement prêt à faire tout ce qu’il faut car tout cela lui semble correct mais qu’il n’est pas imam aussi avant de nous envoyer chez l’imam avec ses instructions, il réclame quelques papiers faciles à trouver :
1-D’abord un numéro d’identification en Mauritanie de la promisse. On lui explique que pour l’instant elle n’a qu’un visa en règle car elle a fait le voyage pour se présenter en personne au mariage même s’il paraît qu’en islam ce n’est pas une obligation, un tuteur ou n’importe qui avec une procuration fait l’affaire. Le Cadi plus conciliant que jamais, demande juste le numéro de demande d’immatriculation même si ensuite c’est refusé, l’essentiel étant le numéro. On n’insiste pas surtout vu que la demande vient de la femme, je n’ai rien à dire. Le Cadi a parfaitement raison, aujourd’hui pour enregistrer biométriquement un mariage à l’état-civil, il faut à la femme une carte de résidente. Incroyable mais vrai. Ainsi on n’a pas le droit de vivre où l’on veut en se mariant d’abord chez soi ni d’épouser une femme qui travaille ailleurs comme tous ces mauritaniens qui épousent une femme au pays puis vont gagner leur vie en Angola. Il faut là encore faire usage de fausse résidence pour contourner l’absurde surtout que même sans enregistrement biométrique le mariage enregistré chez Cadi est reconnu par l’état.
2-Ensuite le Cadi a demandé d’aller dans son ambassade ou faire venir d’Italie un certificat de célibat. On lui a expliqué qu’il n’y a pas d’ambassade d’Italie établie en Mauritanie mais que le document est trouvable en Italie.
3- Et enfin et c’est là l’unique faiblesse du Cadi face à ses responsabilités vu que la lettre lui demande d’être le tuteur ou de choisir un tuteur honorable, il a préféré demander n’importe quel italien de la même confession qu’elle. Sans rien dire, étant moi-même un maure, j’ai trouvé cela bien humiliant que de demander d’aller chercher n’importe quel inconnu pourvu qu’il soit italien surtout que les italiens ne courent pas les rues ici et au nom de quoi faudrait-il en alpaguer un dans la rue ou faire une annonce publique pour expliquer qu’on recherche d’urgence un italien car une compatriote est otage de la procédure d’un cadi qui réclame n’importe quel italien pour la procédure de mariage suivant les règles islamiques en vigueur en Mauritanie ? Tout cela n’est pas sérieux.
J’ai su à cet instant que ce charmant Cadi ne me reverrait plus de sitôt car si c’est pour lui amener n’importe qui, je l’aurais fait avec n’importe quel imam du coin auquel ma bonne foi présumée eût suffi comme c’est souvent le cas.
Nous avons remercié le Cadi après qu’il ait terminé ses réclamations par un sincère « bienvenue en Mauritanie » et nous sommes sortis en lui assurant que nous allons essayer de lui trouver le numéro d’immatriculation en Mauritanie même si la promise n’habite pas là ( sic ! ) , le certificat de célibat et l’italien de bonne foi si on en trouve un.
Complètement découragé et un peu honteux devant la promise de lui montrer la légèreté avec laquelle notre système prend en compte des affaires censées être sérieuses au nom de la religion, je n’avais plus que le choix de renoncer à me marier dans les règles chez moi sans faux et usage de faux en matière de tuteur ou retourner à la case de départ et jouer le jeu hypocrite l’essentiel étant d’obtenir gain de cause face à l’administration qui n’en est pas à une contradiction près.
Un ami me conseilla alors d’aller voir le Cadi de Tayarett car il y a que 3 Cadis à Nouakchott et celui de Tevrag-zeina est absent et l’intérim est assuré par le fameux cadi du Ksar. Je débarque donc là-bas avec mes deux témoins, la promise et tous nos papiers. Après 3h d’attente vu le nombre de candidats à l’audience, nous voilà devant son excellence : un jeune cadi entre deux âges mais un homme accompli.
Rebelote : on lui donne la lettre écrite au cadi du Ksar pour qu’il sache ce qui nous amène, puis étant arabisant, il fait prêter serment à mon frère pour qu’il serve de traducteur en toute bonne foi entre lui et la promise dont il tient le passeport dans les mains. Il lui demande son nom, son âge, son pays d’origine, si elle est célibataire, si son pays d’origine autorise le mariage avec un musulman, si elle est des gens du Livre pratiquante et si en effet chez elle, une femme majeure n’a pas de tuteur.
Fort de tous ces renseignements, il nous dit de revenir la semaine prochaine. On lui explique que la semaine prochaine, elle ne sera plus là car elle travaille à l’étranger et elle est venue juste pour que notre union se fasse. Celui qui se déplacera le plus souvent dans les mois qui suivent en attendant de s’installer quelque part, ce sera moi vu que je travaille à partir d’internet disponible partout. Là le Cadi dit gentiment qu’il ne peut rien faire si elle n’est pas là dans une semaine vu sa connaissance du dossier. Pour ne pas freiner son élan positif, on se quitte en prenant le rendez-vous pour la semaine prochaine.
Pour le rassurer et faciliter ses renseignements à propos de cette italienne sans tuteur et ce mauritanien qui se dit journaliste qu’il ne peut connaître car il ne saisit goutte au français, je lui apporte deux textes fruits de la presse francophone et arabisante. L’un en français à propos d’elle, l’autre à propos de moi à l’époque où je cherchais des soutiens pour aller à Gaza. Il accepte d’y jeter un oeil avec plaisir.
1- http://cridem.org/C_Info.php?article=678601
2- http://www.chezvlane.com/2014/08/merci-ceux-qui-font-circuler-notre.html?view=flipcard
Quelques jours plus tard, je reçois un coup de fil du greffier en chef m’expliquant que le Cadi a étudié le dossier et qu’il est prêt à célébrer le mariage étant lui-même imam. Tout ce qu’il demande c’est de lui procurer avant le départ de la promise un document authentique attestant son célibat et j’ai cru entendre, un mot du père. J’explique au greffier en chef que ce document est impossible à obtenir ici et que la promise nous l’enverra sitôt arrivée en Italie.
Ce qui fut fait avec en plus, pour tranquilliser le Cadi et qu’il n’imagine pas que le mariage se célèbre ici sans la famille du nord pour des raisons obscures, une lettre des parents traduite en arabe par un traducteur agréé en Mauritanie assurant au cadi que les parents sont heureux de l’évènement mais que le droit en italien ne les autorise pas à être tuteurs de leur fille majeure. Toutefois en tant que parents, ils donnent toute autorité en la matière au Cadi afin qu’il prenne les dispositions requises au nom des parents pour que le mariage puisse se faire selon le rite sunnite malikite en vigueur en Mauritanie.
J’apporte tout ça au Cadi de Teyarett en convoquant de nouveau mes témoins. Le Cadi demande à me voir seul et il m’explique que tous les documents sont clairs mais qu’il ne peut rien faire sans la présence de la promise. Je lui fais remarquer qu’elle était dans son bureau il y a 10 jours et elle lui a dit de vive voix qu’elle était d’accord de m’épouser. Je fais aussi remarquer que la femme n’a pas besoin d’être présente surtout avec la lettre des parents et la sienne qui demandent au Cadi d’être un tuteur ou d’en désigner un et je termine en disant que s’il tient vraiment à sa présence : eh ! bien par skype c’est possible, je n’ai qu’à apporter mon ordinateur, elle apparaîtra devant ses yeux. Là, il sourit d’un sourire indéchiffrable, comme pour dire « Il est coriace, j’aurais du mal à le faire renoncer à m’impliquer » en me disant que skype c’est un peu fort et qu’il n’en veut pas.
Ensuite il se lève, tourne dans son bureau pour régler les rideaux histoire de trouver un moyen de lâcher l’air de rien « pourquoi tu ne te maries pas à l’étranger chez elle directement ? ». Je réponds que rien ne m’y empêche sauf que je voulais un mariage chez moi correct d’un point de vue islamique pour être en règle avec les autorités de mon pays. N’ayant rien à ajouter, il me dit qu’il va réfléchir et que je n’ai qu’à revenir la semaine prochaine mais seul cette fois.
La semaine prochaine arrive et en entrant dans son bureau, je trouve, qui apparemment m’attend-là assis en face de mon Cadi en charge du dossier, un jeune homme en costume, presqu’un enfant, que le cadi appelle affectueusement « raïs » ( président ). Je comprendrai bientôt qu’il s’agit d’un autre jeune cadi ou vice-cadi que mon cadi de Teyarett a peut-être convoqué pour qu’il soit témoin de cette affaire de mariage d’une européenne sans tuteur malgré les lettres des parents et la logique du sujet pour éviter le faux et l’usage de faux en matière de tutelle.
Dès que j’ai compris que le Cadi voulait encore me demander un document ou une procuration histoire de me renvoyer à une autre semaine, je n’ai plus rien voulu entendre et une discussion d’une autre nature a commencé entre moi et les deux cadis, l’homme jeune et le jeune homme. Le jeune cadi en costume a voulu se lancer dans une rhétorique formelle à propos du droit comme si j’étais un ignorant à ce sujet. Je lui ai expliqué que le droit en la matière est bancal car il réclame un tuteur impossible à trouver sans faire usage de faux. Le jeune inquisiteur me dit qu’on ne dit pas ce genre de chose à propos du droit. Je lui réponds que même si on ne doit pas le dire cela ne change rien au fait qui par nature est têtu. D’ailleurs, il ne peut plus l’ignorer ni lui ni le cadi en chef car à partir d’aujourd’hui ils doivent savoir tous deux que si une européenne se pointe en disant voilà mon tuteur « weli » c’est faux car dans son pays elle n’a pas de tuteur dès qu’elle est majeure et quiconque se présenterait comme son weli serait un imposteur.
Pour la première fois, j’ai vu une étincelle passer dans les yeux du cadi de Teyarett car jusque-là il était d’un sang-froid parfait et d’une diplomatie exquise même s’il était arrivé au bout des documents requis. Il ne lui manquait plus qu’à réclamer pour la semaine prochaine un coq noir. Il se tourna alors vers moi pour engager un débat de fond qu’il commença par « meun-dra… ». ( mot impossible à traduire en français, c’est comme dire en commençant une phrase « dis-moi… » ou « à votre avis » ou « selon vous » mais le sens implique que c’est une fausse question qui commence car celui qui la pose annonce l’embuscade ). Il me posa alors une question piège pour quelqu’un qui ne parle pas parfaitement arabe et ne peut pas engager une discussion sur certaines subtilités fondées sur une acrobatie savante à propos de science religieuse. Le jeune inquisiteur, digne d’être un major de sa promotion formé dans les écoles de sciences religieuses arrivages certainement wahhabisantes, comprit sur-le-champ sur quel terrain le cadi en chef voulait m’emmener pour que d’une part on oublie le problème que je soulève et que de l’autre la discussion s’envenime à mes dépens.
Heureusement, le « meun-dra » pour annoncer la question m’avait déjà instruit sur le potentiel de la suite de la discussion. Le jeune inquisiteur, haut comme 3 pommes, large comme 2, sans un pli à la ceinture qui annonce un ventre respectable car il commence le métier, pointa vers moi son jeune regard qui se voulait perçant en rajouta son « hein ? » au « meun-dra » du cadi comme on allume un mèche d’une discussion prête à exploser en sachant que chacun y laissera des plumes à la différence qu’ils sont deux contre un. Face à cette redoutable botte comme on dit en escrime, je n’ai plus répondu un mot comme quelqu’un qui baisse manifestement les armes par pudeur devant un jeune inquisiteur prêt à mettre son œil partout en oubliant que je suis son aîné.
Ainsi le jeune inquisiteur n’eût été pas fâché de voir le Cadi de Teyarett insister pour que la discussion s’envenime pour qu’il décide ensuite d’y couper court en disant qu’il refuse d’aller plus loin et mette fin à l’entretien comme à l’affaire qui nous occupe depuis plusieurs jours sauf que le cadi de Teyarett avait sur le jeune inquisiteur l’expérience de l’âge, la connaissance des hommes surtout sous nos cieux, toute une science du terrain qu’on ne peut apprendre entre quatre murs au milieu des livres seuls quelle que soit la longueur de la barbe de l’instructeur. Aussi, mon cadi a-t-il éteint l’étincelle dans ses yeux pour revenir calmement à l’essentiel car manifestement j’étais pour lui une curiosité et il avait fini par comprendre que ili babi malgré une impertinence de bonne foi.
Mais entre-temps la nervosité deux cadis leur a fait lâcher le morceau… Ainsi, après l’effet du « meun-dra » du Cadi allié au « hein ? » perçant de l’apprenti inquisiteur sans réaction de ma part comme un aveu de faiblesse, alors qu’entre nous à part le meun-dra et deux ou trois autres mots, je ne comprenais rien à ce qu’ils racontaient en arabe juridique, ils dirent de concert « si tu veux te marier ici c’est bien parce que tu ne peux pas le faire à l’étranger ». Ils dirent cela avec une telle certitude, une telle assurance, que j’ai compris que c’était la seule conclusion à laquelle ils étaient arrivés bien avant que je ne me présente car les cadis ont l’habitude des histoires louches des mauritaniens qui font rarement les choses de façon claire.
Ainsi partant de la certitude que je cachais quelque chose avec cette histoire de tuteur, ils ont creusé leurs méninges mais ne pouvant rien trouver face à la simplicité de l’histoire et toutes les lettres de la famille sans parler de leurs recherches à propos de ce journaliste et cette anthropologue, ils en sont arrivés à cette conclusion qu’ils m’ont lancée au visage persuadés que de mes yeux allait sortir une étincelle, un flottement et un battement de cils qui allaient leur prouver qu’ils avaient raison comme des chercheurs en physique quantique attendant sur leur installation précaire la manifestation du boson de Higgs.
Hélas pour eux et heureusement pour moi, aucun des signes qu’ils guettaient n’est apparu sur mon visage pourtant pris au dépourvu. Au contraire, bien que parfaitement surpris par leur flèche, ils virent par d’autres signes spontanés combien je trouvais manifestement leur conclusion grotesque.
Aussitôt pour passer l’éponge sur ce test foireux qui ne mit au jour que leur divagation et comme le Cadi n’avait pas que ça à faire, il me demanda pour en finir avec cette histoire de demander à la promise de faire une procuration à n’importe quel neusrani des gens du Livre. Encore n’importe qui ! J’ai alors expliqué au cadi et au jeune inquisiteur mon aventure chez le cadi du Ksar avant d’atterrir à Teyarett. Je leur ai expliqué que le cadi du ksar nous avait reçu avec respect et considération et qu’il était prêt à tout faire sauf que j’ai décidé de ne plus avoir affaire à sa procédure dès qu’il a demandé à la promise de lui amener n’importe qui pourvu qu’il soit italien…
Le jeune inquisiteur me fit remarquer que le Cadi de Teyarett ne dit pas n’importe quel neusrani pourvu qu’il soit italien mais pourvu qu’il soit des gens du Livre comme elle.
Je leur réponds qu’il n’y a aucun problème, je vais transmettre à la promise cette énième procuration réclamée mais qu’entre nous ici présents, je tiens à leur parler désormais en journaliste musulman sur un sujet important. Je tiens à leur dire que plusieurs personnes qui connaissent l’univers des cadis à Nouakchott m’ont dit depuis longtemps de laisser tomber toute cette procédure qui n’en finit pas et d’aller voir le savant Hamden Ould Tah et tout ce qui m’empêche d’aller le chercher c’est la fatigue de devoir encore tout expliquer.
Cela dit, vu que chez le Cadi, surtout chez le greffier en chef, toutes les portes sont ouvertes ainsi que les fenêtres, n’importe qui écoutant à un mètre des concernés, leurs histoires intimes sur des sujets qui peuvent être sensibles dont des bribes arrivent aux oreilles des étrangers, un nom, un bout d’histoire à partir desquels ils vont remplir les trous avec leur imagination fertile machallah mais pas toujours rectiligne car seule compte l’histoire racontée selon les ressors du téléphone arabe, je vais moi aussi rendre publics nos débats sans citer les cadis nommément pour que tous les lecteurs musulmans que le sujet intéresse apprennent ce problème dans notre code du statut personnel à propos de la nécessité formelle d’un tuteur sans prévoir le cas où les autorités compétentes ont affaire à femmes des gens du Livre majeures, citoyennes de démocraties où la tutelle n’existe plus dès 18 ans.
Le deux cadis se regardèrent comme on se dit « tant pis il n’y a rien à cacher ». Aussi, puisque le prophète psl a dit que « la recherche du savoir est une obligation pour tout musulman », comme dans le Coran on peut lire ( sourate 13, verset 19,20, 21 ) « Celui qui sait que ce qui t’est révélé de la part de ton Seigneur est la vérité, est-il semblable à l’aveugle ?
Seuls les gens doués d’intelligence réfléchissent bien, ceux qui remplissent leur engagement envers Allah et ne violent pas le pacte, qui unissent ce qu’Allah a commandé d’unir… »
Je pose donc la dernière question pour en finir : pourquoi le cadi refuse-t-il de nommer quelqu’un pour représenter la promise puisqu’elle et ses parents lui ont donné toute autorité pour le faire ? Il répond qu’un musulman ne peut pas représenter une chrétienne dans le cas qui nous occupe.
Le rendez-vous est pris pour après-demain car ensuite les Cadis partent en vacances. Entre-temps la promise depuis l’Italie doit trouver à Nouakchott quelqu’un des gens du Livre, honnête, de bonne foi et surtout d’accord pour être son représentant dans cette affaire. Le Cadi et le jeune inquisiteur pensent que sous prétexte que je parle français alors je suis censé baigner dans le milieu européen notamment français or Dieu sait que je n’ai pas plus de deux ou 3 amis français à Nouakchott et encore mon meilleur ami est franco-mauritanien et les deux autres sont des amis de fraîches dates.
Rebelote : on lui donne la lettre écrite au cadi du Ksar pour qu’il sache ce qui nous amène, puis étant arabisant, il fait prêter serment à mon frère pour qu’il serve de traducteur en toute bonne foi entre lui et la promise dont il tient le passeport dans les mains. Il lui demande son nom, son âge, son pays d’origine, si elle est célibataire, si son pays d’origine autorise le mariage avec un musulman, si elle est des gens du Livre pratiquante et si en effet chez elle, une femme majeure n’a pas de tuteur.
Fort de tous ces renseignements, il nous dit de revenir la semaine prochaine. On lui explique que la semaine prochaine, elle ne sera plus là car elle travaille à l’étranger et elle est venue juste pour que notre union se fasse. Celui qui se déplacera le plus souvent dans les mois qui suivent en attendant de s’installer quelque part, ce sera moi vu que je travaille à partir d’internet disponible partout. Là le Cadi dit gentiment qu’il ne peut rien faire si elle n’est pas là dans une semaine vu sa connaissance du dossier. Pour ne pas freiner son élan positif, on se quitte en prenant le rendez-vous pour la semaine prochaine.
Pour le rassurer et faciliter ses renseignements à propos de cette italienne sans tuteur et ce mauritanien qui se dit journaliste qu’il ne peut connaître car il ne saisit goutte au français, je lui apporte deux textes fruits de la presse francophone et arabisante. L’un en français à propos d’elle, l’autre à propos de moi à l’époque où je cherchais des soutiens pour aller à Gaza. Il accepte d’y jeter un oeil avec plaisir.
1- http://cridem.org/C_Info.php?article=678601
2- http://www.chezvlane.com/2014/08/merci-ceux-qui-font-circuler-notre.html?view=flipcard
Quelques jours plus tard, je reçois un coup de fil du greffier en chef m’expliquant que le Cadi a étudié le dossier et qu’il est prêt à célébrer le mariage étant lui-même imam. Tout ce qu’il demande c’est de lui procurer avant le départ de la promise un document authentique attestant son célibat et j’ai cru entendre, un mot du père. J’explique au greffier en chef que ce document est impossible à obtenir ici et que la promise nous l’enverra sitôt arrivée en Italie.
Ce qui fut fait avec en plus, pour tranquilliser le Cadi et qu’il n’imagine pas que le mariage se célèbre ici sans la famille du nord pour des raisons obscures, une lettre des parents traduite en arabe par un traducteur agréé en Mauritanie assurant au cadi que les parents sont heureux de l’évènement mais que le droit en italien ne les autorise pas à être tuteurs de leur fille majeure. Toutefois en tant que parents, ils donnent toute autorité en la matière au Cadi afin qu’il prenne les dispositions requises au nom des parents pour que le mariage puisse se faire selon le rite sunnite malikite en vigueur en Mauritanie.
J’apporte tout ça au Cadi de Teyarett en convoquant de nouveau mes témoins. Le Cadi demande à me voir seul et il m’explique que tous les documents sont clairs mais qu’il ne peut rien faire sans la présence de la promise. Je lui fais remarquer qu’elle était dans son bureau il y a 10 jours et elle lui a dit de vive voix qu’elle était d’accord de m’épouser. Je fais aussi remarquer que la femme n’a pas besoin d’être présente surtout avec la lettre des parents et la sienne qui demandent au Cadi d’être un tuteur ou d’en désigner un et je termine en disant que s’il tient vraiment à sa présence : eh ! bien par skype c’est possible, je n’ai qu’à apporter mon ordinateur, elle apparaîtra devant ses yeux. Là, il sourit d’un sourire indéchiffrable, comme pour dire « Il est coriace, j’aurais du mal à le faire renoncer à m’impliquer » en me disant que skype c’est un peu fort et qu’il n’en veut pas.
Ensuite il se lève, tourne dans son bureau pour régler les rideaux histoire de trouver un moyen de lâcher l’air de rien « pourquoi tu ne te maries pas à l’étranger chez elle directement ? ». Je réponds que rien ne m’y empêche sauf que je voulais un mariage chez moi correct d’un point de vue islamique pour être en règle avec les autorités de mon pays. N’ayant rien à ajouter, il me dit qu’il va réfléchir et que je n’ai qu’à revenir la semaine prochaine mais seul cette fois.
La semaine prochaine arrive et en entrant dans son bureau, je trouve, qui apparemment m’attend-là assis en face de mon Cadi en charge du dossier, un jeune homme en costume, presqu’un enfant, que le cadi appelle affectueusement « raïs » ( président ). Je comprendrai bientôt qu’il s’agit d’un autre jeune cadi ou vice-cadi que mon cadi de Teyarett a peut-être convoqué pour qu’il soit témoin de cette affaire de mariage d’une européenne sans tuteur malgré les lettres des parents et la logique du sujet pour éviter le faux et l’usage de faux en matière de tutelle.
Dès que j’ai compris que le Cadi voulait encore me demander un document ou une procuration histoire de me renvoyer à une autre semaine, je n’ai plus rien voulu entendre et une discussion d’une autre nature a commencé entre moi et les deux cadis, l’homme jeune et le jeune homme. Le jeune cadi en costume a voulu se lancer dans une rhétorique formelle à propos du droit comme si j’étais un ignorant à ce sujet. Je lui ai expliqué que le droit en la matière est bancal car il réclame un tuteur impossible à trouver sans faire usage de faux. Le jeune inquisiteur me dit qu’on ne dit pas ce genre de chose à propos du droit. Je lui réponds que même si on ne doit pas le dire cela ne change rien au fait qui par nature est têtu. D’ailleurs, il ne peut plus l’ignorer ni lui ni le cadi en chef car à partir d’aujourd’hui ils doivent savoir tous deux que si une européenne se pointe en disant voilà mon tuteur « weli » c’est faux car dans son pays elle n’a pas de tuteur dès qu’elle est majeure et quiconque se présenterait comme son weli serait un imposteur.
Pour la première fois, j’ai vu une étincelle passer dans les yeux du cadi de Teyarett car jusque-là il était d’un sang-froid parfait et d’une diplomatie exquise même s’il était arrivé au bout des documents requis. Il ne lui manquait plus qu’à réclamer pour la semaine prochaine un coq noir. Il se tourna alors vers moi pour engager un débat de fond qu’il commença par « meun-dra… ». ( mot impossible à traduire en français, c’est comme dire en commençant une phrase « dis-moi… » ou « à votre avis » ou « selon vous » mais le sens implique que c’est une fausse question qui commence car celui qui la pose annonce l’embuscade ). Il me posa alors une question piège pour quelqu’un qui ne parle pas parfaitement arabe et ne peut pas engager une discussion sur certaines subtilités fondées sur une acrobatie savante à propos de science religieuse. Le jeune inquisiteur, digne d’être un major de sa promotion formé dans les écoles de sciences religieuses arrivages certainement wahhabisantes, comprit sur-le-champ sur quel terrain le cadi en chef voulait m’emmener pour que d’une part on oublie le problème que je soulève et que de l’autre la discussion s’envenime à mes dépens.
Heureusement, le « meun-dra » pour annoncer la question m’avait déjà instruit sur le potentiel de la suite de la discussion. Le jeune inquisiteur, haut comme 3 pommes, large comme 2, sans un pli à la ceinture qui annonce un ventre respectable car il commence le métier, pointa vers moi son jeune regard qui se voulait perçant en rajouta son « hein ? » au « meun-dra » du cadi comme on allume un mèche d’une discussion prête à exploser en sachant que chacun y laissera des plumes à la différence qu’ils sont deux contre un. Face à cette redoutable botte comme on dit en escrime, je n’ai plus répondu un mot comme quelqu’un qui baisse manifestement les armes par pudeur devant un jeune inquisiteur prêt à mettre son œil partout en oubliant que je suis son aîné.
Ainsi le jeune inquisiteur n’eût été pas fâché de voir le Cadi de Teyarett insister pour que la discussion s’envenime pour qu’il décide ensuite d’y couper court en disant qu’il refuse d’aller plus loin et mette fin à l’entretien comme à l’affaire qui nous occupe depuis plusieurs jours sauf que le cadi de Teyarett avait sur le jeune inquisiteur l’expérience de l’âge, la connaissance des hommes surtout sous nos cieux, toute une science du terrain qu’on ne peut apprendre entre quatre murs au milieu des livres seuls quelle que soit la longueur de la barbe de l’instructeur. Aussi, mon cadi a-t-il éteint l’étincelle dans ses yeux pour revenir calmement à l’essentiel car manifestement j’étais pour lui une curiosité et il avait fini par comprendre que ili babi malgré une impertinence de bonne foi.
Mais entre-temps la nervosité deux cadis leur a fait lâcher le morceau… Ainsi, après l’effet du « meun-dra » du Cadi allié au « hein ? » perçant de l’apprenti inquisiteur sans réaction de ma part comme un aveu de faiblesse, alors qu’entre nous à part le meun-dra et deux ou trois autres mots, je ne comprenais rien à ce qu’ils racontaient en arabe juridique, ils dirent de concert « si tu veux te marier ici c’est bien parce que tu ne peux pas le faire à l’étranger ». Ils dirent cela avec une telle certitude, une telle assurance, que j’ai compris que c’était la seule conclusion à laquelle ils étaient arrivés bien avant que je ne me présente car les cadis ont l’habitude des histoires louches des mauritaniens qui font rarement les choses de façon claire.
Ainsi partant de la certitude que je cachais quelque chose avec cette histoire de tuteur, ils ont creusé leurs méninges mais ne pouvant rien trouver face à la simplicité de l’histoire et toutes les lettres de la famille sans parler de leurs recherches à propos de ce journaliste et cette anthropologue, ils en sont arrivés à cette conclusion qu’ils m’ont lancée au visage persuadés que de mes yeux allait sortir une étincelle, un flottement et un battement de cils qui allaient leur prouver qu’ils avaient raison comme des chercheurs en physique quantique attendant sur leur installation précaire la manifestation du boson de Higgs.
Hélas pour eux et heureusement pour moi, aucun des signes qu’ils guettaient n’est apparu sur mon visage pourtant pris au dépourvu. Au contraire, bien que parfaitement surpris par leur flèche, ils virent par d’autres signes spontanés combien je trouvais manifestement leur conclusion grotesque.
Aussitôt pour passer l’éponge sur ce test foireux qui ne mit au jour que leur divagation et comme le Cadi n’avait pas que ça à faire, il me demanda pour en finir avec cette histoire de demander à la promise de faire une procuration à n’importe quel neusrani des gens du Livre. Encore n’importe qui ! J’ai alors expliqué au cadi et au jeune inquisiteur mon aventure chez le cadi du Ksar avant d’atterrir à Teyarett. Je leur ai expliqué que le cadi du ksar nous avait reçu avec respect et considération et qu’il était prêt à tout faire sauf que j’ai décidé de ne plus avoir affaire à sa procédure dès qu’il a demandé à la promise de lui amener n’importe qui pourvu qu’il soit italien…
Le jeune inquisiteur me fit remarquer que le Cadi de Teyarett ne dit pas n’importe quel neusrani pourvu qu’il soit italien mais pourvu qu’il soit des gens du Livre comme elle.
Je leur réponds qu’il n’y a aucun problème, je vais transmettre à la promise cette énième procuration réclamée mais qu’entre nous ici présents, je tiens à leur parler désormais en journaliste musulman sur un sujet important. Je tiens à leur dire que plusieurs personnes qui connaissent l’univers des cadis à Nouakchott m’ont dit depuis longtemps de laisser tomber toute cette procédure qui n’en finit pas et d’aller voir le savant Hamden Ould Tah et tout ce qui m’empêche d’aller le chercher c’est la fatigue de devoir encore tout expliquer.
Cela dit, vu que chez le Cadi, surtout chez le greffier en chef, toutes les portes sont ouvertes ainsi que les fenêtres, n’importe qui écoutant à un mètre des concernés, leurs histoires intimes sur des sujets qui peuvent être sensibles dont des bribes arrivent aux oreilles des étrangers, un nom, un bout d’histoire à partir desquels ils vont remplir les trous avec leur imagination fertile machallah mais pas toujours rectiligne car seule compte l’histoire racontée selon les ressors du téléphone arabe, je vais moi aussi rendre publics nos débats sans citer les cadis nommément pour que tous les lecteurs musulmans que le sujet intéresse apprennent ce problème dans notre code du statut personnel à propos de la nécessité formelle d’un tuteur sans prévoir le cas où les autorités compétentes ont affaire à femmes des gens du Livre majeures, citoyennes de démocraties où la tutelle n’existe plus dès 18 ans.
Le deux cadis se regardèrent comme on se dit « tant pis il n’y a rien à cacher ». Aussi, puisque le prophète psl a dit que « la recherche du savoir est une obligation pour tout musulman », comme dans le Coran on peut lire ( sourate 13, verset 19,20, 21 ) « Celui qui sait que ce qui t’est révélé de la part de ton Seigneur est la vérité, est-il semblable à l’aveugle ?
Seuls les gens doués d’intelligence réfléchissent bien, ceux qui remplissent leur engagement envers Allah et ne violent pas le pacte, qui unissent ce qu’Allah a commandé d’unir… »
Je pose donc la dernière question pour en finir : pourquoi le cadi refuse-t-il de nommer quelqu’un pour représenter la promise puisqu’elle et ses parents lui ont donné toute autorité pour le faire ? Il répond qu’un musulman ne peut pas représenter une chrétienne dans le cas qui nous occupe.
Le rendez-vous est pris pour après-demain car ensuite les Cadis partent en vacances. Entre-temps la promise depuis l’Italie doit trouver à Nouakchott quelqu’un des gens du Livre, honnête, de bonne foi et surtout d’accord pour être son représentant dans cette affaire. Le Cadi et le jeune inquisiteur pensent que sous prétexte que je parle français alors je suis censé baigner dans le milieu européen notamment français or Dieu sait que je n’ai pas plus de deux ou 3 amis français à Nouakchott et encore mon meilleur ami est franco-mauritanien et les deux autres sont des amis de fraîches dates.
Je ne connais personne à l’ambassade de France sinon l’ambassadeur que j’ai raconté récemment chez lui à l’occasion du départ d’un ami. Il nous a reçus chaleureusement. L’ambassadeur est un fin diplomate ouvert mais je ne le tutoie pas. Pour le reste le Cadi et son jeune inquisiteur ne savent pas que les gens du Livre sont de plus en plus rares car en Europe, l’église ne fait plus recette après avoir fait couler le sang pendant des siècles, étouffé les libertés, muselé les penseurs, liquidé les scientifiques, malmené les philosophes comme certains sont en train de le faire avec l’islam. En europe, plusieurs états en sont arrivés à reconnaître le mariage gay contrairement à l’Italie où ce n’est pas près d’arriver car l’église compte encore de nombreux fidèles qui sont autant d'électeurs pour lesquels le mariage est l’institution sacrée de la filiation.
Tout ça pour dire que trouver le bon représentant en deux jours semblait être une mission impossible surtout qu’ensuite le Cadi prendrait ses vacances.
Soudain, j’ai pensé à un ami commun mais ce serait un miracle qu’il soit à Nouakchott. Je l’appelle, il répond. On prend rendez-vous. Me voilà chez lui. Je lui explique tout et bien entendu il répond en français l’équivalent de wollahi.
Ironie du sort, le cadi voulait un neusrani, eh ! bien il ne pouvait trouver plus neusrani. Un français comme on en fait plus, un homme mûr témoin du meilleur de la France qui se perd. Un homme généreux, simple, un savant qui apprend pour connaître et non paraître, curieux de tout, amoureux de la langue arabe et passionné de culture. Un homme de sciences politiques, de sciences sociales, un anthropologue de formation comme la promise et surtout un homme de justice car il collabore avec le ministère de la justice pour consolider l’état de droit en Mauritanie.
https://blogs.mediapart.fr/christophe-courtin
Autre ironie du sort, ce neusrani réclamé par le cadi pour représenter la promise est un original avec une moustache à la Faidherbe et en plus son prénom provient du grec christos qui signifie "Christ" ou "sacré" et de phoros qui veut dire "porter". Littéralement, Christophe est "celui qui porte le Christ".
Le Cadi pouvait-il espérer plus digne représentant des gens du Livre pour la promise ? Il n’en demandait peut-être pas tant dans son bureau.
Après avoir traduit la procuration de la promise en arabe par le même traducteur agréé qui connaît désormais toute l’histoire, nous sommes de nouveau arrivés chez le Cadi de Teyarett avec mes deux témoins plus le français en question.
Cette fois, au vu de l’identité du représentant de la promise, plus de doute, cette histoire est claire, le mariage peut être établi. Après avoir vérifié la carte de résident du Christophe déjà célèbre par sa moustache au ministère de la justice, il posa les questions sur la volonté de la promise, le montant de la dot etc., puis le cadi donna ses instructions au greffier en chef pour établir l’acte de mariage.
Ensuite toutes les personnes autorisées ont signé l’acte de mariage avec deux clauses demandées par la promise et que beaucoup de femmes ne savent pas qu’elles y ont droit : interdire au mari de prendre une autre épouse sous peine d’annuler le mariage et le droit de se répudier elle-même. (article 28 et 29)
http://droit-afrique.com/upload/doc/mauritanie/Mauritanie-Code-2001-statut-personnel.pdf
Je remercie le Cadi de Teyarett ainsi que son jeune greffier en chef tous deux parfaits arabisants pour la considération et le respect accordé au dossier qu’il leur fut soumis par un citoyen lambda. Le Cadi est un homme dont la savante simplicité et le sang-froid à toute épreuve inspirent respect et considération. Il fut pointilleux sous tous les aspects ne sachant pas les premiers jours à qui il avait affaire et n’ignorant rien de la capacité de nos compatriotes à verser dans des affaires obscures.
Le jeune greffier en chef n’est pas en reste, courtois et efficace, makiftou-shi, il fait un travail difficile avec tout le sérieux requis malgré l’assaut incessant des citoyens car sa porte et ses fenêtres sont toujours ouvertes. On peut juste regretter le manque de discrétion que cela provoque même si on comprend que c’est le prix à payer pour prouver qu’il n’y a rien à cacher. Renseignements pris, il sort de l’E.N.A de Nouakchott.
C’est la première fois que je passe si longtemps dans le monde des Cadis. Ce fut l’occasion, en attendant mon audience et en tendant l’oreille comme tout le monde, de voir combien c’est un métier complexe qui demande des nerfs d’acier et une bonne foi à toute épreuve car ils sont les premiers dans la hiérarchie judiciaire à recevoir tous les litiges sur tous les sujets notamment les drames familiaux au milieu d’enfants innocents, de femmes ballotées par des hommes sans scrupules ou de maris brisés par des femmes sans vertu. Au milieu de tout ça, il faut trancher et guider vers les tribunaux mille affaires économiques en tout genre.
De là ce sang-froid chaleureux du Cadi qui essaie de trouver d’abord des solutions à l’amiable. »
VLANE
Tout ça pour dire que trouver le bon représentant en deux jours semblait être une mission impossible surtout qu’ensuite le Cadi prendrait ses vacances.
Soudain, j’ai pensé à un ami commun mais ce serait un miracle qu’il soit à Nouakchott. Je l’appelle, il répond. On prend rendez-vous. Me voilà chez lui. Je lui explique tout et bien entendu il répond en français l’équivalent de wollahi.
Ironie du sort, le cadi voulait un neusrani, eh ! bien il ne pouvait trouver plus neusrani. Un français comme on en fait plus, un homme mûr témoin du meilleur de la France qui se perd. Un homme généreux, simple, un savant qui apprend pour connaître et non paraître, curieux de tout, amoureux de la langue arabe et passionné de culture. Un homme de sciences politiques, de sciences sociales, un anthropologue de formation comme la promise et surtout un homme de justice car il collabore avec le ministère de la justice pour consolider l’état de droit en Mauritanie.
https://blogs.mediapart.fr/christophe-courtin
Autre ironie du sort, ce neusrani réclamé par le cadi pour représenter la promise est un original avec une moustache à la Faidherbe et en plus son prénom provient du grec christos qui signifie "Christ" ou "sacré" et de phoros qui veut dire "porter". Littéralement, Christophe est "celui qui porte le Christ".
Le Cadi pouvait-il espérer plus digne représentant des gens du Livre pour la promise ? Il n’en demandait peut-être pas tant dans son bureau.
Après avoir traduit la procuration de la promise en arabe par le même traducteur agréé qui connaît désormais toute l’histoire, nous sommes de nouveau arrivés chez le Cadi de Teyarett avec mes deux témoins plus le français en question.
Cette fois, au vu de l’identité du représentant de la promise, plus de doute, cette histoire est claire, le mariage peut être établi. Après avoir vérifié la carte de résident du Christophe déjà célèbre par sa moustache au ministère de la justice, il posa les questions sur la volonté de la promise, le montant de la dot etc., puis le cadi donna ses instructions au greffier en chef pour établir l’acte de mariage.
Ensuite toutes les personnes autorisées ont signé l’acte de mariage avec deux clauses demandées par la promise et que beaucoup de femmes ne savent pas qu’elles y ont droit : interdire au mari de prendre une autre épouse sous peine d’annuler le mariage et le droit de se répudier elle-même. (article 28 et 29)
http://droit-afrique.com/upload/doc/mauritanie/Mauritanie-Code-2001-statut-personnel.pdf
Je remercie le Cadi de Teyarett ainsi que son jeune greffier en chef tous deux parfaits arabisants pour la considération et le respect accordé au dossier qu’il leur fut soumis par un citoyen lambda. Le Cadi est un homme dont la savante simplicité et le sang-froid à toute épreuve inspirent respect et considération. Il fut pointilleux sous tous les aspects ne sachant pas les premiers jours à qui il avait affaire et n’ignorant rien de la capacité de nos compatriotes à verser dans des affaires obscures.
Le jeune greffier en chef n’est pas en reste, courtois et efficace, makiftou-shi, il fait un travail difficile avec tout le sérieux requis malgré l’assaut incessant des citoyens car sa porte et ses fenêtres sont toujours ouvertes. On peut juste regretter le manque de discrétion que cela provoque même si on comprend que c’est le prix à payer pour prouver qu’il n’y a rien à cacher. Renseignements pris, il sort de l’E.N.A de Nouakchott.
C’est la première fois que je passe si longtemps dans le monde des Cadis. Ce fut l’occasion, en attendant mon audience et en tendant l’oreille comme tout le monde, de voir combien c’est un métier complexe qui demande des nerfs d’acier et une bonne foi à toute épreuve car ils sont les premiers dans la hiérarchie judiciaire à recevoir tous les litiges sur tous les sujets notamment les drames familiaux au milieu d’enfants innocents, de femmes ballotées par des hommes sans scrupules ou de maris brisés par des femmes sans vertu. Au milieu de tout ça, il faut trancher et guider vers les tribunaux mille affaires économiques en tout genre.
De là ce sang-froid chaleureux du Cadi qui essaie de trouver d’abord des solutions à l’amiable. »
VLANE