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Souci inavouable du pouvoir : comment neutraliser les blogueurs en exil aux USA et au Canada ?

Mardi 22 Septembre 2020 - 18:07

C’est la question que se pose secrètement le pouvoir mauritanien sans avoir la moindre réponse envisageable car les blogueurs les plus suivis ont la nationalité canadienne et américaine.

En 2017, la république démocratique du Sénégal de Macky Sall avait le même problème avec un blogueur sénégalais, Assane Diouf qui était aussi suivi qu’un Taleb Abdel Wodoud. Il osait dire des choses impossibles à tenir même au Sénégal à base d’insultes à visage découvert et autres accusations diverses qui seraient fondées sur des documents présentés comme étant en sa possession via le clan Wade.

Ne sachant comment le faire taire et ne voulant pas intervenir officiellement auprès des USA pour ne pas augmenter son prestige et le présenter en héros de l’opposition au Sénégal, l’ambassade sénégalaise aux USA a attendu patiemment qu’il fasse une gaffe emporté par sa fièvre verbale.

C’est arrivé quand il a dit qu’il allait envoyer de l’argent pour que les jeunes aillent manifester devant une prison où était enfermé un marabout dont il était proche. Le problème, si je ne m’abuse, c’est que le marabout en question était derrière les barreaux pour une affaire de sécurité en lien avec le terrorisme. Comme il s’agissait de dollars, les sénégalais ont dénoncé Assane Diouf aux autorités compétentes américaines.

Tout d’un coup, il a vu débarquer chez lui une dizaine de voitures du FBI. Ils l’ont coffré et très vite, youtube a fermé sa chaîne domerame.tv ( une terrible insulte en wolof ) mais le FBI a vite compris qu’il n’avait rien à voir avec le terrorisme mais en enquêtant ils ont découvert non seulement qu’il était en situation irrégulière, ce que le Sénégal savait, mais en plus qu’il était entré aux USA avec le passeport de son frère. Les Sénégalais savaient qu’une fois pris dans les griffes de l’administration américaine, ils n’allaient pas le relâcher.

Ainsi le FBI l’a remis aux services d’immigration qui l’ont renvoyé à Dakar ! Il s’attendait à tout sauf à cette possibilité. L’envoyer à Dakar c’était signer son arrêt de mort tellement il s’en était pris à tout le monde marabouts compris mais au-delà d’une certainement limite, la sagesse africaine vous fait passer pour un pauvre fou afin de vous épargner un lynchage certain.

C’est ce qui est arrivé. L’état n’a pas voulu l’accabler et chacun a compris qu’il fallait le laisser traîner à Dakar sans lui donner d’importance.

Ce coup de maître des sénégalais n’est pas possible avec les blogueurs mauritaniens très suivis en exil au Canada ou aux USA car ils ont la nationalité canadienne et américaine.

Que faire face à eux ? Il n’y a rien à faire sinon encaisser leurs sorties qui trouvent un écho considérable chez toutes les couches de la population. Tout au plus ceux qui sont insultés et traités de voleurs peuvent-ils s’organiser, payer des avocats pour porter plainte aux USA et au Canada pour diffamation mais ça leur coûterait une fortune. L’état mauritanien pourrait aussi les attaquer en justice pour incitation au meurtre quand l’un déclare qu’il faudrait tirer un balle à tel et tel.

Le pouvoir actuel dépassé par la guerre numérique quand les attaques viennent de l’extérieur portées par des mauritaniens ayant des nationalités étrangères, ne sait pas comment réagir sinon en faisant la sourde oreille. Petit à petit s’installe un front anti-pouvoir d’une autre nature que celui qu’Aziz avait nourri.

Sous Aziz le front contre le pouvoir était morcelé car il occupait le peuple par des divisions entre noirs et blancs, hratine et beidhânes, progressistes et fanatiques pendant qu’il terrorisait l’administration par la menace de l’emploi et le privé par les impôts.

La nouveauté aujourd’hui c’est que les blogueurs mauritaniens les plus suivis par le peuple sont des beidhânes et leurs discours consistent à déconstruire le feu de diversion hérité des régimes précédents et poussé à son extrême par Aziz. Ainsi ils disent haut et fort qu’ils sont contre le racisme, pour un état de droit où tous auraient les mêmes droits, ils disent que les nominations faites au nom de la tribu ou de la région ne servent personne sinon ceux qui sont nommés et leurs familles. Tout cela est fait avec un langage qui sonne vrai en hassania et aucun d’eux n’a de casseroles à craindre en parlant.

Le résultat est là. On sent monter en Mauritanie un front pauvres contre riches dépassant les clivages de couleurs ou de tribus. Les pauvres seraient les honnêtes et regroupant même la classe moyenne face aux riches présentés comme étant les voleurs et fils de voleurs jusqu’au coeur de l’armée qui aurait créé une école polytechnique bien dotée afin que leurs enfants échappent au système éducatif national pour la masse.

Entre deux live, les blogueurs publient des commentaires avec des documents annonçant que la gabegie continue, que les postes sont toujours fruits du favoritisme d’un groupe prédateur qui fait des petits pendant que le reste du pays crève dans la misère et le chômage. L’effet est saisissant au niveau des classes populaires et de la classe moyenne.

Bien sûr ce que souhaitent les blogueurs n’arrivera pas demain à savoir voir les gens dehors en masse pour renverser le pouvoir mais cela crée un malaise profond contre le régime qui peut faire le lit d’un coup d’état sachant que peuple suivra surtout que le régime actuel se caractérise par une ouverture d’esprit sans précédent, une tolérance inouïe. On ne perd plus son travail pour un commentaire sur les réseaux sociaux. On entend même un policier insulter ses chefs qu’il accuse d’être en connivence avec un étranger vendeur d’alcool alors que lui voulait défendre une citoyenne tabassée par l’étranger.

Tout ça prouve que quelque chose se passe chez nous. Un mécontentement général étouffé par la force et la menace par Aziz est en train de vouloir exploser car le régime semble ne pas mordre.
La gestion de l’affaire Aziz fruit du rapport de la CEP contribue à donner l’impression que le régime est mou même face à un tel prédateur alors que la procédure judiciaire suit son cours normalement mais ça, les gens n’en ont pas l’habitude.

Du côté du pouvoir, les partis de la majorité ne disent rien mais n’apprécient pas les cadeaux faits à l’opposition au point que les gens se demandent où est l’opposition si même un Birame et un Lo Gourmo chantent les décisions du régime Ghazouanien.

Il paraît que Ghazouani serait prêt lors d’une visite aux USA et au Canada à rencontrer ces fameux blogueurs certain que sa cuisine psychologique, qui a anesthésié tant d’opposants, saurait faire mouche encore une fois. Ce serait une erreur car ils sont trop jeunes, financièrement indépendants et l’ivresse d’être suivis par des milliers de mauritaniens n’a pas de prix surtout qu’au fond ils semblent convaincus par leur engagement même s’ils n’osent pas rentrer au pays affronter ce pouvoir contre lequel ils excitent ceux qui n’ont pas pu comme eux fuir le pays pour un avenir meilleur.

De toute façon, le régime actuel n’a rien à craindre des mots d’où qu’ils viennent car le pays est sous bonne garde et le premier qui voudra mettre le nez dehors pour agir sur le monde réel sait ce qui l’attend : un coup de matraque sur la tête et une rafale de gaz lacrimo. Pour les plus rebelles, une disparition deux jours remet les pendules à l’heure éternelle de la résignation pacifique.

Tout ça pour dire que nous vivons une période de logique floue pour les observateurs extérieurs au pouvoir. Pourvu que de l’intérieur ils sachent très bien ce qu’ils font… Inch’allah…

VLANE

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