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Pourquoi les femmes et les nouveau-nés meurent tant en Mauritanie, débat entre experts

Vendredi 9 Août 2019 - 12:43

Pendant toute la journée du 29 juillet 2019, les acteurs de la santé maternelle et infantile ont disséqué les résultats de l’Enquête Rapide sur les Besoins en Soins Obstétricaux et néonataux d’Urgence (ERB SONU) 2018. Il était question de discuter du nombre important de femmes et de nouveau-nés qui meurent en Mauritanie du fait d’une grossesse ou d’un accouchement. Les experts sont unanimes que ces décès sont dus, en grande partie, à l’absence de soins obstétricaux et néonataux de qualité dans les formations sanitaires.


Les résultats de l’ERB SONU 2018 ont eu l’effet d’une massue assénée sur les participants de l’atelier du 29 juillet 2019 organisé par le Programme National de la Santé de la Reproduction (PNSR) avec l’appui du Fonds des Nations Unies pour la Population (UNFPA). Certaines formations sanitaires ne manquent en général que d’une fonction vitale pour sauver les femmes en couche et contribuer à la réduction du fort taux de mortalité maternelle et néonatale. Seul satisfecit, la Mauritanie compte 9 SONU Complets (SONU C), soit 4 Centres hospitaliers régionaux (Aïoun, Atar, Sélibaby et Néma) en plus de 5 centres de santé à Nouakchott, à savoir les hôpitaux nationaux et le centre de Sebkha.

Ouvrant les travaux de l’atelier, le Secrétaire général du Ministère de la Santé, M.Abdallahi Ould Bouhada, a reconnu les avancées réalisées dans le domaine de la santé de la mère et de l’enfant, mais trouve que«beaucoup reste à faire». Selon lui, les résultants de l’ERB SONU 2018 et de la mission exploratoire dans les zones d’intervention de l’UNFPA peuvent aider à «mieux cerner les problèmes et apporter des solutions afin qu’aucune femme ne meurt en donnant la vie». Il a enfin lancé «un plaidoyer fort aux acteurs impliqués dans la santé maternelle et infantile», pour qu’ils fédèrent leurs actions avec le ministère de la Santé «pour une meilleure prise en compte des résultat de l’ERB SONU et de la mission exploratoire », afin de contribuer à la réduction du taux de mortalité maternelle et infantile au niveau fixé par le gouvernement dans ses documents de politique en matière de santé.

Auparavant, le Représentant Résident de l’UNFPA en Mauritanie, SEM. Saidou Kaboré, avait rappelé que l’objet de l’atelier est d’œuvrer à la réduction de la mortalité maternelle et néonatale en se basant, entre autres, sur les résultats de l’ERB SONU 2018, soulignant que «le décès maternel est le point de départ d’un avenir brisé pour une famille » et qu’il a été prouvé par des études scientifiques que «tout décès maternel entraîne généralement la réduction de l’espérance de vie de l’époux et partant celle des enfants». D’où selon lui, l’engagement qui doit être celui de tous, hommes et femmes, «pour contribuer à l’atteinte de l’objectif ZERO décès maternel évitable d’ici 2030», l’un des objectifs des ODD. Pour y arriver, il a cité comme préalables, l’existence de données fiables comme l’ERB SONU comme base de décision et l’intégration des SONU dans toutes les interventions des acteurs, chacun en fonction de ses mandats.

Objectifs et résultats attendus

Les participants ont suivi par la suite deux grandes communications, dont l’une présentée par le Coordinateur du PNSR, Dr. Sidi Mohamed Ould Abdel Aziz, sur les objectifs et les résultats attendus de l’atelier, rappelant les chiffres effrayants de la mortalité maternelle  (982 pour 100.000 naissances vivantes), celle de la mortalité néonatale (29 pour 1.000) et de la mortalité infantile (34 pour 1.000). Il compte, dira-t-il en substance, sur l’Enquête démographique et de santé (EDS) prévue cette année, pour traduire dans les chiffres, les efforts consentis ces dernières années dans ce domaine.  Il a déploré les nombreux décès maternel à Nouakchott dus à l’éclampsie, et les décès à l’intérieur du pays dus à l’hémorragie, à l’infection, ou à d’autres causes liées à des consultations prénatales ou à des orientations mal faites, sinon à la mauvaise gestion des ressources humaines qui explique la concentration du personnel à Nouakchott plutôt qu’en régions.


Les opportunités existent selon Dr. Sidi Mohamed Ould Abdel Aziz pour renverser la tendance, citant la SCAPP 2016-2030, le PNDS, la loi sur la santé de la reproduction et son décret d’application, non sans évoquer les défis qui persistent, comme la faiblesse des infrastructures et des services SONU de qualité, les moyens limités en équipements et en médicaments, la qualité de la ressource humaine et l’absence de coordination pour l’intervention des acteurs et partenaires.

Principaux résultats de l’ERB SONU 2018

Dr. Kane Amadou Racine, ancien Coordinateur du PNSR et ancien fonctionnaire international à l’OMS, a présenté les résultats de l’ERB SONU 2018 qui a ciblé les 9 Wilayas (sur les 15 que compte la Mauritanie), là où les taux de mortalité maternelle et néonatale sont les plus élevés. Il s’agit des deux Hodhs, Assaba, Gorgol, Guidimagha, Adrar, et les  3 Wilayas de Nouakchott, soit un échantillon de 201 formations sanitaires.


Si l’objectif spécifique de l’enquête, selon Dr. Kane est de guider les décideurs dans la planification et l’allocation des ressources nécessaires pour renforcer le système de santé en utilisant les SONU comme porte d’entrée, l’objectif global est de faire le point sur les formations sanitaires disposant de services SONU, d’apprécier leur répartition, la qualité de la ressource humaine et des soins  prodigués aux patients, mais surtout la disponibilité du matériel vital (ventouse, aspirateur oral) et des médicaments essentiels (antibiotiques, utérotoniques, anticonvulsivants, contraceptifs).

Il a évoqué ensuite les résultats de la mission exploratoire des zones d’intervention de l’UNFPA dans les deux Hodhs, Assaba, Gogol, Guidimagha et Nouakchott, et leur recoupement avec l’ERB SONU, à savoir la non éligibilité de la quasi-totalité des formations sanitaires aux normes fixant la qualité de SONU B. La plupart des centres de santé manquent en général d’une ou deux fonctions, voire trois, dont les plus récurrentes sont la ventouse et l’aspirateur.

La fin de l’atelier a été marquée par un panel des partenaires au cours duquel, les principales agences, les organisations nationales et internationales ont chacun expliqué les actions qu’ils mènent dans le domaine de la santé de la mère et de l’enfant en Mauritanie.

Réactions 

Les réactions ont été nombreuses et le débat animé aux termes des deux communications.

Zeynabou Taleb Moussa, présidente de l’Association Mauritanienne pour la Santé de la Mère et de l’Enfant (AMSME) : «je me demande pourquoi personne n’a rien fait pour combler le gap, en mettant à disposition le matériel manquant, ventouse et aspirateur manuel, ce qui empêche la majorité des structures de santé d’être SONU B».

Vatimetou Mint Moulaye, Présidente de l’Association des Sages-femmes : «il n’y a pas eu de progrès depuis la première enquête SONU de 2013, par rapport surtout à ce manque récurrent d’un matériel aussi vital et peu coûteux que la ventouse au niveau des formations sanitaires »

Cheikh Aïdara

source aidara.mondoblog.org

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