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un grain de sable pour secouer la poussière...

Voilà tout ce qui manque à Ghazouani

Vendredi 26 Février 2021 - 18:13

Voilà tout ce qui manque à Ghazouani

 

A peine un an et demi après son élection, voilà déjà que les observateurs avertis désignent son successeur en la personne du ministre de la défense le général Hanena Ould Sidi comme si l’actuel chef d’Etat n’était qu’un président de transition. C’est inquiétant et injuste car s’il n’occupe pas l’espace médiatique comme Aziz au point de sembler absent, il n’en travaille pas moins beaucoup sinon la scène politique ne serait pas apaisée mais c’est un travail diplomatique qui demande de la discrétion. De là le sentiment de vide après Aziz qui ne ratait aucune occasion de montrer qu’il était dans l’action et que l’unique chef c’était lui.

 

Si Ghazouani gouverne autrement, ce n’est pas plus mal mais encore faudrait-il savoir doser non seulement la présence médiatique mais surtout la cohérence de la politique à l’heure du procès des années Aziz sur le feu. Ghazouani communique mais autrement, il communique via les leaders de partis politiques et les activistes qui se chargent ensuite de convaincre leurs partisans. Cette communication indirecte est pilotée par son directeur de cabinet et un autre ministre proche du président. L’un se charge des tribus et des affaires arabes et l’autre des activités de la société civile de la Mauritanie plurielle.

 

 


Mohamed Ahmed Ould Mohamed Lemine
Mohamed Ahmed Ould Mohamed Lemine

Le dircab, personnage sympathique, réservé tout droit sorti des grimoires du tribalisme, a été choisi non seulement car proche du chef de l’Etat mais surtout car ne parlant pas un mot de français et étant un révisionniste déclaré inféodé aux pays riches arabes, il assure le soutien de l’Etat profond conservateur qu’Aziz a excité contre la France pendant dix ans pour réécrire l’histoire coloniale en piétinant les pères fondateurs mauritaniens présentés comme collabos au sens nazi du terme. Le bilan azizien en la matière a dépassé ses espérances, une majorité de jeunes ânonnent désormais cette désinformation d’Etat qui donne le bon rôle aux médecins après la mort. 

 

L’autre puissant ministre, mais beaucoup moins que le dircab, est un inestimable diplomate capable d’éteindre tous les feux et mettre quasiment n’importe qui dans sa poche. Sans lui, il ne resterait rien de moderne face à la politique tribaliste et régionaliste du dircab.

 

Ce duo fonctionne relativement bien malgré parfois une guerre des chefs quand l’un estime par exemple que tel serait un bon collaborateur du président et que l’autre bloque l’initiative car dans son univers conservateur, il ne s’agit pour lui que d’un hartani francophone de surcroît de Boutilimit.

 

Ainsi on peut dire que le régime de Ghazouani communique mais à l’ancienne comme cela se faisait sous la tente du chef. Pas de communication directe entre le chef et le peuple ou très peu à de rares occasions avec un tout puissant «  moudir el diwan », directeur de cabinet, gardien de la porte et des ambitions, filtre au service de l’oreille du chef avec tous les dangers que représente cet unique canal vers le patron pour les civils car les militaires ont une autre porte.

 

Le résultat de cette communication indirecte a montré son efficacité : la scène politique et médiatique est d’un calme olympien. Même Birame chante pour le pouvoir. Combien de temps va-t-il chanter ? Cela dépend du carburant qui l’anime. Le dialogue politique que réclament les opposants n’a plus de raison d’être puisqu’ils ont été reçus un à un, des postes ont été accordés à leurs proches et chacun se félicite de l’état d’esprit du président. Pourquoi réclamer un autre dialogue ? A ce rythme, on devrait fusionner les partis de l’opposition et du pouvoir pour retourner au parti unique puisque tous sont d’accord pour dire que Ghazouani est l’homme qu’il faut pour mettre tout le monde d’accord.

 

Le revers de la médaille de cette réussite en communication indirecte c’est que le peuple est livré aux leaders d’opinion en exil et même sur le territoire chacun se rend compte que quelque chose ne va pas. On indexe le régime d’Aziz et on promeut ses complices à des hauts postes : DG de grandes entreprises publiques, puissants ministres et ambassadeurs dans les grandes capitales du monde.

 

Tout ce qui manque à la communication du président ce sont des relais crédibles qui puissent justifier cette politique avec des arguments convaincants car on ne doute pas une seconde que cela obéit à une finesse politique dont le dircab a le secret qui peut tenir en une phrase : rassurer l’Etat profond qui tient l’Etat dont quasiment tous les rouages sont tenus par des gens nommés par Aziz et changer les choses à petit feu sans se faire des ennemis pour l’avenir. De là des cadeaux même aux soutiens d’Aziz quitte à les faire au détriment des soutiens de Ghazouani.

 

Il faut donner aux partisans de Ghazouani de bonne foi des éléments de langage pour permettre au plus grand nombre de déchiffrer cette politique car aujourd’hui ils ne savent plus quoi dire face à ce brouillard qui dessert l’action du nouveau régime qui a à son bénéfice une nouvelle manière de gouverner qui mérite un soutien collectif malgré quelques archaïsmes à neutraliser.

 

 


Justifier la délicatesse réservée à Aziz et ses collaborateurs malgré la gravité des accusations. Aziz semble plus en cellule de dégrisement, après l’ivresse du pouvoir, que dans l’antichambre d’un palais de justice. En effet si Aziz a été neutralisé c’est surtout parce qu’il était devenu dangereux même pour l’armée car pour nuire à ceux qui l’ont déposé diplomatiquement il est prêt à dire n’importe quoi or l’armée ce n’est pas l’assemblée nationale. Les chefs, même à la retraite, sont tenus de donner l’exemple en respectant l’institution sinon plus aucun militaire ne se sentira tenu de respecter la hiérarchie militaire.

 

Justifier que l’ex ministre de la santé soit encore ambassadeur alors que l’actuel ministre de la santé et même l’ex PM ont dit qu’à leur arrivée nous n’avions pas même une ambulance équipée pendant que l’ex ministre de la santé disait que tout allait pour le mieux à telle enseigne que bientôt les africains de la région viendraient se soigner chez nous.

 

Justifier que l’innocent ex ambassadeur au Koweit a été débarqué sans parachute pour céder sa place à l’ex porte-parole d’Aziz révisionniste qui a justifié avec zèle toutes les dérives politiques d’Aziz même contre l’unité nationale.

 

Justifier qu’à propos du braquage sans précédent de la BCM,  les seconds couteaux croupissent actuellement en prison à cause d’une faille majeure dans la sécurité au niveau de la banque centrale alors qu’aucun responsable de haut niveau n’a été indexé.  Au Japon même coupable de rien le gouverneur de la banque centrale se serait incliné 30 minutes et aurait démissionné de toutes fonctions publiques.

 

Justifier l’impunité absolue dont jouissent Cheikh Rida et ses complices malgré une escroquerie de plusieurs dizaines de milliards qui a mis des milliers de familles à la rue.

 

On peut ainsi allonger la liste d’explications à délivrer. Il faut des arguments qui tiennent debout. C’est au service de communication de trouver les éléments de langage sinon petit à petit les partisans d’Aziz  gagneront la guerre médiatique et tout le monde dira qu’Aziz est une victime de gens aussi coupables que lui qui le prennent en otage pour l’empêcher de parler puis le condamner en bouc émissaire alors qu’il a quitté le pouvoir de son propre chef ; aucun de ses adversaires d’aujourd’hui civils ou militaires ne pouvait, selon ses dires, le regarder dans les yeux sans trembler encore moins songer à le déposséder du pouvoir. 

 

Communiquer avec un souci de convaincre, voilà tout ce qui manque à Ghazouani pour gouverner avec cohérence or à ce jour, il ne semble s’adresser qu’aux forces invisibles qui tiennent le pays. Plus personne ne ménage les apparences…

Ahmed Ould Soueid Ahmed

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