Tout part du premier aéroport, tout part là encore d’un Daddah, tout part d’une affaire opposant la nationalité mauritanienne à la nationalité française. En effet, à l’époque, le futur ambassadeur monsieur Mohameden Ould Moctar Ould Daddah n’était encore qu’un fonctionnaire comme un autre au ministère des affaires étrangères. Son frère Azeddine devait faire un petit voyage. Arrivé à l’aéroport, refusant de jouer à l’hypocrite avec les autorités mauritaniennes en matière de double nationalité, il déposa ses deux passeports mauritanien et français au guichet de la police des frontières pour justifier qu’il n’ait pas besoin de visa sur son passeport mauritanien.
D’habitude cette honnêteté est appréciée surtout que c’est un secret de polichinelle que le métis Azeddine a deux nationalités comme des milliers d’autres mauritaniens. Cette fois, les autorités compétentes ont vu rouge et au lieu de confisquer le passeport mauritanien du jeune homme et l’obliger sous peine de prison ou d’expulsion de prendre un visa mauritanien sur son passeport français ou une carte de résident, les autorités ont commis une bourde : ils ont confisqué le passeport français qui est par définition une propriété de l’état émetteur…
Azeddine a raté son avion, perdu son billet et le voilà engagé dans un marathon pour récupérer ses papiers. Finalement les autorités mauritaniennes furent obligées de lui rendre son passeport français car cela embarrassait l’ambassade de France embarquée de plein droit dans cette affaire vu que le passeport est la propriété de l’état Français.
Que dit la loi mauritanienne ? Avant Aziz, elle disait tout simplement que tout mauritanien qui prend une nouvelle nationalité perd d’office la nationalité mauritanienne. Le nouveau code de la nationalité bancal croit faire avancer le sujet en permettant au mauritanien qui le souhaite de bénéficier d’un droit à la double nationalité s’il en fait la demande.
Le code de la nationalité comme bien des textes de droit mauritanien est bancal, il ne prévoit rien pour les métis comme le code des douanes ne prévoit rien pour les voitures de collection interdites d’importation depuis la loi interdisant le territoire à toute voiture vieille de plus de 9 ans, je crois. C’est aberrant. On demande donc au métis de choisir entre père et mère niant ainsi son identité de métis, génétiquement de double origine ce qui devrait donner le droit à l’équité en matière de droit à la culture et même à la nationalité.
Pire ! La loi ne prévoit pas que le métis ne choisit pas d’acquérir la double nationalité puisque, de droit du sang, il l’obtient des deux pays dès la naissance ! On ne peut donc pas dire qu’un métis franco-mauritanien ait choisi une nationalité. C’est un vide juridique à propos des métis que le pouvoir devrait combler s’il veut être juste et non barbare obligeant les métis à choisir entre père et mère ou longer les murs de la république mauritanienne comme s’ils étaient dès la naissance des hors-la-loi tolérés.
Dès la confiscation du passeport Azeddine, tollé général entre d’une part ceux qui estimaient c'est une bourde monumentale que de confisquer le passeport français surtout qu’Azeddine a toujours été franc avec les autorités et ceux qui estimaient qu’il n’aurait pas dû jouer à la franchise et qu’il aurait dû user des ficelles pour sauver les apparences quitte à voyager avec un passeport mauritanien portant mention du visa français surtout que la loi française est claire au sujet des binationaux, ils ne peuvent plus recourir au secours de l’ambassade de France sitôt qu’ils mettent le pied dans le pays étranger en question.
J’ai d’ailleurs trouvé surréaliste cette nationalité en pointillé qui disparaît sitôt qu’on met le pied dans l'autre pays concerné car la nationalité ne devrait pas être séparée de l’identité or une identité ne peut pas être en pointillé avec des zones où on la perd ou du moins on ne jouirait plus des droits de tout français. Cette question devrait être soulevée au parlement français mais personne à ce jour n’a pu ou voulu la porter.
Tout est-il que 4 jours après cet incident dans le premier aéroport, le frère Mohameden fut nommé pour la première fois ambassadeur à Bruxelles. Dans notre pays où ce genre de chose n’arrive pas par hasard face à une telle actualité, chacun y a vu un geste d’apaisement venant de la présidence.
Azeddine quant à lui reprit son passeport français et fait profil bas depuis.
Tout allait bien entre la famille du père de nation et le pouvoir jusqu’à l’affaire OumTounsi. Nous sommes les premiers à avoir parlé de l’incongruité de ce choix.
Puis d’autres lanceurs d’alerte ont rejoint le débat notamment l'ex colonel Beibacar qui n’y est pas allé de main morte puisque démonstration à l’appui, il a expliqué toute l’étendue du scandale historique.
Dans cette atmosphère de manipulation historique divisant les mauritaniens, les tribus en soi-disant résistants et présumés traîtres à la résistance, madame Daddah veuve de feu Moctar Ould Daddah, et présidente de la fondation Moctar Ould Daddah publia une lettre ouverte au chef de l’état le mettant en garde contre le choix de Oum Tounsi, littéralement « la mère du tunisien » (sic) en rappelant que le nom du père de la nation serait plus rassembleur.
La présidente, au lieu du respect dû à son âge, son mérite et son droit à défendre la mémoire du père de la nation, venait ainsi de signer l’arrêt de mort de sa fondation. Tout de suite, dès le conseil des ministres suivant, le pouvoir retira à la Fondation son caractère d’utilité publique. Quelle violence symbolique !
Pour ma part même si je pense, après coup, que la fondation n’aurait pas dû rendre publique cette lettre et qu’elle aurait dû la transmettre par un canal confidentiel ou même demander audience au chef de l’état qui a été élu la première fois sous le sceau de l’héritage Daddah, je reste convaincu que le contenu de la lettre est à mettre au bénéfice de l’honneur de la première dame et du devoir de la fondation Daddah.
Là encore tollé général à propos des Daddah et du pouvoir, le tout à partir d’un incident dont l’origine est toujours un aéroport le nouveau cette fois-ci.
Tout le monde se demanda ce qui allait advenir du fils Daddah qui venait de bénéficier d’une promotion en étant nommé à Washington après Bruxelles.
Le suspens dura 7 mois. L’ambassadeur Daddah est rentré à Nouakchott comme on entre dans un placard. Plus de nouvelle de son départ pour Washington. Les révisionnistes qui excitent le pouvoir attendaient certainement un dérapage venant de l’entourage du nouvel ambassadeur Daddah pour avoir de quoi le faire jeter aux oubliettes définitivement. C’était mal connaître le fameux diplomate, personnage on ne peut plus calme et tranquille.
Soudain l’autre jour, apparaît sur facebook une photo de son excellence Mohameden Daddah avec Obama. Le pouvoir n’a donc pas voulu accabler la famille…
Reste un problème de conscience : comment l’aîné des fils Moctar Daddah qui a fait carrière à l’ombre de maman et de sa fondation, vu qu’il la suivait partout, peut-il accepter ce poste alors que la fondation a été humiliée pour avoir défendu le droit du père de la nation comme nom du nouvel aéroport international de Nouakchott ?
Pouvait-il refuser dans un pays du tiers-monde face à un pouvoir redoutable en matière de persécutions administratives ? Qu’aurait-on fait à sa place ? J’ai toujours estimé que lorsqu’on est célibataire surtout sans enfants, on a le devoir, en cas de convictions, de s’opposer mais sitôt qu’on devient chef de famille, c’est de l’inconscience face au rapport de force surtout quand soi-même on n’a jamais été ni opposant ni militant à rien.
A la place de Mohameden j’aurais accepté le poste comme on avale une couleuvre. Bien des fonctionnaires, bien des gens de la majorité ne soutiennent le pouvoir que pour avoir la paix.
Reste que c’est un coup d’une violence symbolique extrême, une double humiliation que de retirer à la fondation du père de la nation son caractère d’utilité publique pour ensuite mettre le fils aîné dans une position qui de fait cautionne cette politique du pouvoir même si on peut estimer que, Dieu merci, les enfants majeurs n’ont pas à suivre aveuglément les orientations politiques de leurs parents qui, en l’occurrence, sont parfaitement défendables...