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un grain de sable pour secouer la poussière...

Avant d’aller à Paris : le double-jeu de l’Etat face aux investisseurs...

Dimanche 16 Mai 2021 - 11:38

On apprend qu’hier le ministère de la défense aurait envoyé un convoi de la gendarmerie pour déloger les orpailleurs de la région de Temaya dans le cadre d’un accord avec Kinross Tasiast. Cela tombe bien car demain la Mauritanie sera à Paris pour le sommet à propos des économies africaines ; il s’agira entre autres de discuter de l’annulation de la dette et de soutien financier ; autant faire un geste vis-à-vis des investisseurs alors que la veille, l’Etat a donné du matériel à des orpailleurs installés dans le Tijirit et dont une partie d’entre eux exploitent illégalement un permis minier international d’une société canadienne.

Pourquoi ne pas envoyer aussi la gendarmerie libérer le terrain du projet de l’usine en construction de la société Tirex SA empêchée physiquement de travailler par une poignée d’orpailleurs illégaux sachant que ces orpailleurs ne seraient pas là si la société n’avait pas fait une découverte aurifère à coup de dizaines de millions de dollars investis dans notre désert ?

Aujourd’hui le camp de cette usine en construction est fermé en attendant que les autorités mauritaniennes décident ou non de sécuriser ce périmètre privé dans le cadre des prérogatives sécuritaires de l’Etat.

Cet abandon de la société étrangère à son sort face aux orpailleurs illégaux laisse perplexes les investisseurs qui ont de quoi s’inquiéter. Tout semble indiquer que le fait accompli d’invasion des orpailleurs, dont on imagine mal qu’ils puissent bloquer un projet de construction d’une mine d’or sans de puissants soutiens, consiste peut-être à pousser à bout les investisseurs jusqu’à ce qu’ils renoncent à exploiter la mine car ils ne peuvent pas rester indéfiniment à attendre que l’Etat respecte sa signature et son devoir de sécurité des lieux et donc des investissements.

Si cela devait arriver, la Mauritanie pourrait récupérer ce périmètre aurifère après avoir profité des dizaines de millions de dollars investis par des étrangers pour trouver de l’or mais quel sera le coût international pour l’Etat face aux investisseurs étrangers ? C’est incalculable pour l’instant. Il faudra au moins rembourser autour de dizaines de millions de dollars si les investisseurs acceptent l’argent et évitent le procès mais cela ne changera rien à l’image désastreuse de l’Etat mauritanien.

De là ce beau coup d’envoyer la gendarmerie libérer le périmètre de Kinross Tasiast pour rassurer ces investisseurs dont le poids médiatique et financier est supérieur à ce second investisseur dans la zone en Mauritanie puisque son usine est encore en phase de démarrage. Ainsi l’Etat brisera le front des investisseurs étrangers et pourra ensuite accuser le cas échéant la société Tirex SA d’avoir jeté l’éponge trop vite ou de n’avoir pas respecté telle et telle clauses du contrat les liant à l’Etat mauritanien. C’eût été bien joué pour la Mauritanie si on ne savait pas à qui profiterait ce tour de passe-passe comme chacun sait à qui profite pour majorité le labeur de la majorité des pauvres orpailleurs.

Les investisseurs ne sont responsables que de respecter le code minier mauritanien car ce sont les mauritaniens qui l’ont écrit. Ils subissent en l'occurrence le non-respect par l’Etat de ses engagements sécuritaires. Plus généralement, les investisseurs étrangers se plaignent aussi notamment en matière d’impôts car ils sont souvent livrés à l’arbitraire notamment quand il s’agit de certaines exonérations sans parler des permis de travail pour du personnel qualifié qu’ils n'obtiennent pas au nom de la mauritanisation des postes qui n’est souvent qu’un prétexte pour un trafic d'influence au service de l’entourage de tel ministre.

Aujourd’hui, les investisseurs lésés de la mine du projet Tijirit ont de bonnes raisons de craindre cette expédition de la gendarmerie car elle va probablement envoyer sur leur périmètre un nouveau flot d’orpailleurs illégaux. Si ladite société décidait de s’en aller du pays, comme bien d’autres avant elle, plus personne ne viendra sauf les chinois qui eux ne sont pas tenus de respecter la mauritanisation des postes puisqu’ils ne travaillent qu’entre chinois.

Il est temps que le chef de l’Etat sonne la fin de la ruée illégale vers l’or sur les périmètres attribués à des sociétés étrangères qui investissent des dizaines de millions dans notre pays. Les barons couchés à Nouakchott ont assez profité de ce filon pendant que la présence de leurs orpailleurs misérables est mise sur le compte de l’utilité publique…

Il est temps de faire cohabiter sereinement orpailleurs artisanaux et investisseurs industriels.

Ahmed Ould Soueid Ahmed

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