Depuis que le rapport de Juan E Mendez a été rendu public, ceux qui l’ont lu ne peuvent qu’être sidérés par le traitement qu’en a fait la presse mauritanienne qui a soit menti directement en faisant dire au rapporteur ce qu’il n’a pas dit ou indirectement en versant dans des mensonges par omission parfaitement scandaleux quand il s’agit d’informer sinon il s’agit de rétention d’information sur des sujets très graves notamment les femmes et les enfants.
Le rapporteur de l’ONU n’est pas en reste en matière de bêtise quand il « tient à rappeler que l’usage excessif de la force est interdit en vertu du droit international et que les forces de l’ordre sont tenues d’utiliser des méthodes non-violentes. ».
Depuis quand les forces de l’ordre sont tenues d’utiliser des méthodes non violentes alors qu’elles sont au minimum partout dans le monde armées au moins de matraques ? Comment fait-on pour maintenir l’ordre face à des manifestants récalcitrants ou agissant pour créer le désordre ? Comment faire disperser des manifestions non autorisées ou interdites quand les manifestants sont décidés à imposer leur volonté contre l’ordre public ?
Je ne parle pas de quelques manifestants pacifiques qui manifestent pour la juste cause qu’une grenade lacrymaux peut disperser, je parle de cette phrase qui dit que face au droit international les forces de l’ordre sont tenues d’utiliser des méthodes non violentes. Il faut regarder tout récemment aux USA et en France face aux manifestations contre la loi El Khomri comment les manifestants ont été matraqués, gazés avec parfois un mort.
Autre bêtise du rapporteur : dire dans une république réputée islamique à propos de l’apostasie dans l’affaire Mkheitir qu’il ne s’agit pas de crime les plus graves : « 34 Le rapporteur spécial note avec regret l’invocation des dispositions très vagues de l’article 306 et l’imposition de la peine capitale pour une infraction ne tombant pas dans la catégorie des crimes les plus graves. »
Mais en matière de bêtise, les autorités mauritaniennes ne sont pas en reste, voir le résultat de leurs déclarations quand le rapporteur écrit avec humour : « 30. Des représentants du Ministère de l’intérieur et de la décentralisation ont assuré au Rapporteur spécial qu’aucune plainte pour usage excessif de la force contre des manifestants n’avait été déposée au cours des cinq ou six mois précédant sa visite. Les autorités locales de Rosso, ville frontalière du sud du pays où de nombreuses manifestations auraient été dispersées au moyen d’une force excessive, lui ont indiqué que pas une seule plainte n’avait été déposée contre les forces de l’ordre. Ces statistiques déconcertantes, plutôt que de suggérer l’absence de raisons de se plaindre, donnent à penser que les mécanismes de plainte sont dans une large mesure défaillants. »
Quant au sujet : la torture, les traitements inhumains, cruels, dégradants en Mauritanie :
Un journaliste du Calame, repris par Cridem a tranquillement inventé que le rapporteur a jugé « inacceptable » la loi d’amnistie à propos du passif humanitaire. C’est faux ! Le mot inacceptable n’a jamais été écrit dans le rapport et les guillemets utilisés par le journaliste prêtent à confusion car se sont les mêmes qui sont utilisés pour cité le rapport.
Le mot dans le rapport est « inapplicable » voilà le paragraphe entier. On s’étonne là encore que le rapporteur puisse trouver la loi d’amnistie utile pour en même temps estimer qu’il faudrait la remettre en cause car elle irait contre le droit international.
« 107. Certaines questions n’ont toutefois pas encore été réglées, et l’on ne peut se contenter de les éluder. Le Rapporteur spécial reconnaît l’utilité de lois telles que la loi d’amnistie de 1993, mais il rappelle également que, pour que la Mauritanie entre dans une ère nouvelle de cohésion sociale, le droit international ne lui permet pas d’accorder une amnistie générale par laquelle elle renoncerait à enquêter sur les crimes internationaux, qui comprennent les actes de torture, les expulsions massives et les exécutions extrajudiciaires. Ces infractions doivent faire l’objet d’enquêtes, et les responsables doivent être poursuivis et punis ; les mesures d’amnistie et la prescription de l’action publique sont inapplicables. »
Le journaliste Nicolas Beau s’y met avec sa déontologie habituelle. Le titre de son article « La culture de la torture gangrène la Mauritanie ».
Cridem qui reprend son article falsifie le titre lui-même faux en mettant répandue à la place de gangrène pour en faire « La culture de la torture Répandue en Mauritanie »
Bien sûr aucun de ces professionnels de la presse ne dira cette phrase du rapport pour nuancer les choses :
« 15. La torture et les mauvais traitements ne sont plus généralisés en Mauritanie, mais restent fréquents. »
A propos de la culture de la torture, il est très grave de cacher aux lecteurs les nuances du rapport et laisser croire qu’en Mauritanie rien n’a changé depuis l’époque des régimes militaires dont le rapporteur parle lui-même au passé. De plus c’est décourager le régime en place que faire croire qu’aujourd’hui c’est pareil qu’hier. On a vu le résultat en matière des droits des hratines.
Depuis les campagnes médiatiques internationales menées par certains, jamais les hratines n’ont été aussi marginalisés par le pouvoir car justement on a distillé chez les maures blancs la peur face aux hratines. On peut en conclure facilement que les activités pour la cause des hratines par leur méthodes contreproductives font le jeu des racistes et des chauvins à l’intérieur du pouvoir en même temps qu’ils effraient la majorité des maures blancs qui entendent dans les médias qu’ils seraient tous des racistes et des esclavagistes.
A propos de la torture en Mauritanie c’est pareil. Mis à part ce que vivent les terroristes, dont on dira un mot plus bas, le rapport dit ceci :
« 19. Bien qu’il semblerait que les détenus subissent surtout des pressions physiques et psychologiques lors des interrogatoires liés à des crimes graves, de telles pressions seraient également exercées sur les personnes soupçonnées d’avoir commis des délits mineurs ou des infractions ordinaires. »
Il faut dire exactement ce que le mot torture contient en Mauritanie car c’est un mot terrible. Bien qu’il arrive souvent que les détenus soient malmenés comme le dit l’article 19 du rapport et cela peut aller jusqu’à des blessures mais cela se limite à ce que confirme l’article 20 :
« 20 - Ces mauvais traitements sont en règle générale infligés pendant de courtes périodes et les blessures qui en résultent guérissent d’elles-mêmes sans laisser de cicatrices physiques. »
C’est de la torture, nous sommes d’accord mais c’est l’échelle basse de la torture. En Mauritanie on ne pend plus, on ne disparaît plus, on ne noie plus, on ne mutile plus, on n’arrache plus les ongles, on ne casse plus les dents, on n’électrocute plus les parties génitales, on n’étrangle plus, on ne brise plus.
Il reste de la torture sous la forme connue aujourd’hui et que le rapporteur appelle « surtout des pressions physiques et psychologiques ». Cela ne change rien au terme torture mais il faut dire les choses comme elles sont et ne pas dire torture dans toutes les acceptions du terme.
Tout cela d’ailleurs n’est pas le sujet de mon commentaire. C’est à l’Etat de se défendre. Je crains surtout pour l’image qu’on donne du pays et il faut en donner l’image la plus juste.
Ce qui est scandaleux de la part de la presse mauritanienne et étrangère qui travaille pour l’opposition radicale, ce n’est pas d’inventer un mot du rapporteur ou se focaliser juste sur la violence policière, c’est surtout de ne rien dire à propos de manquements graves notés par le rapporteur qui touchent aux femmes et aux enfants qui n’ont eux aucun Birame ni aucun Daoud pour les défendre. Personne…
Par exemple, figurez-vous que dans la république islamique de Mauritanie, celle où les hommes et les femmes ne font pas la queue, si j’ose dire, dans le même rang, eh bien dans la prison des femmes, les gardiens de cellules sont des hommes ! C’est incroyable surtout que le rapporteur dit aussi que personne ne surveille ce qui se passe dans les prisons. Les juges d’instructions et les procureurs n’y mettent jamais les pieds ou rarement et pire que tout, la commission nationale des droits de l’homme n’y a jamais mis les pieds depuis 5 ans ! Faute de moyens…
Ainsi à propos de la prison des femmes on peut lire : « 56. Il est particulièrement préoccupant que des gardes nationaux de sexe masculin soient également responsables de la sécurité intérieure et extérieure de la prison pour femmes et qu’ils y aient librement accès aux cellules. »
Toujours à propos des violences faites aux femmes : alors qu’il paraît que 69% des femmes ont subi des mutilations génitales qu’on fait passer au niveau des populations musulmanes pour de la circoncision féminine alors que dans un cas il s’agit de couper un morceau de peau et dans l’autre couper un organe, le plus sensible qui soit, l’état mauritanien n’a pas eu le courage de mettre une ligne à ce sujet dans sa loi contre la violence basée sur le genre ; loi qui prit le chemin de la fuite parlementaire face aux islamistes et aux conservateurs…
Le rapporteur écrit « 41. Le Gouvernement a intensifié ses efforts en vue de mettre un terme à cette pratique, que l’on justifie généralement en invoquant la tradition ou la religion. Le Rapporteur spécial salue les efforts déployés pour sensibiliser la population à cette question et pour coopérer avec les autorités religieuses et culturelles. Il note toutefois avec préoccupation que le projet de loi sur la violence sexuelle et sexiste, adopté en mars 2016 par le Conseil des ministres, ne tient pas pleinement compte des obligations internationales de la Mauritanie dans le domaine des droits de l’homme et ne contient aucune disposition sur les mutilations génitales féminines. »
A propos de la surveillance : « 101. Il est alarmant de constater qu’actuellement, en Mauritanie, les lieux de privation de liberté ne font pas l’objet d’une surveillance officielle. Les procureurs et les juges d’instruction, qui sont tenus de visiter régulièrement les lieux de détention, le font rarement, et il n’existe aucun programme d’aide juridictionnelle ou de défense publique pour surveiller les lieux de détention. "
A propos des enfants et de mineurs dans le centre CARSEC, le rapporteur parle de cas avérés de traitements dignes d’être qualifiés de torture notamment une longue période de mise à l’isolement et maltraitance notamment les châtiments corporels.
Le rapporteur peut-il être certain que rien ne lui a échappé ? Comment se fait-il qu’il faille attendre le rapporteur de l’ONU pour entendre parler de ça même si la presse a commencé à s’intéresser à ce qui s’y passe sans avoir les moyens d’enquêter sérieusement pour lever les soupçons ? N’y a-t-il personne parmi les partenaires U.E, UNICEF, Terre des Hommes Italie pour savoir ce qui s’y passe exactement vu qu’ils sont des partenaires financiers ? Comment se fait-il qu’aucune enquête indépendante n'ait été menée ? Comment aucune plainte ? Il n’y a pas de fumée sans feu or la fumée s’échappe déjà. A suivre…
Que se passe-t-il exactement au CARSEC dont le budget selon la loi de finance 2016 avale l'équivalent d'1/3 du budget de toute la direction des affaires pénales et de l'administration pénitentiaire soit près de 108 millions d’ouguiyas pour environ 40 enfants sans parler des aides extérieures…
Sans enquête sur le terrain avec les moyens qu'il faut, audition des enfants et du personnel dans les règles de l’art pour éviter la peur des représailles, juste en étant de passage, le rapporteur écrit :
« 69. Au cours de sa visite, le Rapporteur spécial a constaté que les conditions de vie y étaient décentes et que les mineurs y étaient généralement bien traités et pouvaient avoir accès à un enseignement, à une formation professionnelle et à des activités récréatives.
En revanche, il a reçu des informations crédibles selon lesquelles certains membres du personnel administraient des châtiments corporels. Il a également été informé que des enfants étaient placés à l’isolement, seuls ou en petits groupes, pendant de longues périodes (entre un et deux mois), dans de petites cellules séparées.
Les enfants soumis à ce régime n’avaient pas le droit de mener leurs activités habituelles et ne pouvaient quitter leur cellule que pendant de brefs moments, par exemple pour aller manger ou pour aller aux toilettes.
Pareil traitement, même s’il est imposé à titre de mesure disciplinaire, constitue un traitement cruel, inhumain et dégradant. Le Rapporteur spécial insiste sur le fait que la mise à l’isolement des mineurs, définie comme un isolement de vingt-deux à vingt-quatre heures par jour, est considérée comme un acte de torture. »
On pourrait continuer ainsi l’analyse du rapport qui mérite attention mais c’est trop long et nous en avons assez dit. Une pensée aux migrants dont le rapport parle aussi pour parler des conditions dramatiques, parler de l’ordre national des avocats qui se doit de faire en sorte qu’il n’y ait pas comme aujourd’hui dans certaines régions un seul avocat. Parler de la loi sur la torture qui semble-t-il ne s’applique pas aux terroristes, parler du fait que détenus et prévenus soient mélangés en prison, parler de bien des choses graves dont parle ce rapport mais c’est trop long.
L’essentiel étant d’avoir, je l’espère, donné envie de le lire après avoir montré combien la presse mauritanienne ne traite pas ces sujets correctement et se permet même de mentir soit directement soit par omission sur des sujets aussi graves juste pour enfoncer le pouvoir en oubliant femmes et enfants. C’est une mauvaise méthode. Vu l’état catastrophique des lieux, dire la vérité suffit pour être subversif avec l’avantage de rester crédible.
Une mention spéciale à Outouma Soumaré qui dirige l’hôpital Dia, baptisé officiellement centre hospitalier des spécialités. Le rapporteur écrit : « 72. La Mauritanie ne compte qu’une aile psychiatrique, à l’hôpital neuropsychiatrique de Nouakchott, d’une capacité de 21 lits. Il s’agit d’un établissement ouvert où les patients sont généralement accueillis avec leur famille, qui est pleinement associée à leur traitement. Les patients ne sont pas placés à l’isolement, ni entravés ni autrement restreints dans leurs mouvements. Aucune thérapie par électrochocs n’est utilisée.
La démarche thérapeutique de l’hôpital pâtit du manque de médicaments et de substances psychoactives fournis par l’État. Toutefois, les conditions sont de manière générale très bonnes et le Rapporteur spécial félicite les autorités chargées de cet établissement exemplaire. »