Pendant le ramadan, chacun souriait de voir le peu d’engouement pour aller s’inscrire sur les listes électorales. On a cru à un moment à une léthargie définitive signe de la fin d’un pouvoir dont on dit naïvement le chef sur le départ. C’était le ramadan. Depuis, les gens ont bu et mangé. Voilà que le chef de l’état entre dans la danse en déclarant le cirque ouvert. A ce seul signal tous ceux qui ont le moindre lien avec le pouvoir se croient obligés de dire, avant le secret de l’isoloir, qu’ils sont pour les amendements même les travailleurs du programme EMEL.
C’est le début de la victoire car l’état est le plus grand employeur de la république. Voilà dix ans qu’Aziz à chaque conseil des ministres nomme des obligés selon un dosage tribalo-régional reflet de la domination du moment. Cela fait du monde, il suffit de faire le calcul et y ajouter les familles. Chacun de ces élus suivant son grade nommant à son tour autour de lui ceux qui seront ses obligés. Ainsi toute l’administration est tenue, les entreprises publiques jusqu’au moindre commandement dans l’armée.
Tout ce monde qui tient l’état, les médias et les forces de sécurité risque sa carrière en cas de changement de régime et la discipline est telle que quiconque dit un mot, écrit une ligne sur le net, se permet un commentaire qui tombe dans une mauvaise oreille ou un faux ami risque de voir son salaire soudainement bloqué. La torture psychologique, l’embrigadement qui fait que chacun ne bouge plus, ne pense plus sinon pour attaquer éventuellement un clan du pouvoir auquel chacun appartient pour justement défendre celui à qui on doit tout.
Comment imaginer qu’un vote puisse aller contre cette machine de domination psychologique où l'élite y trouve son compte face à l’indigence généralisée où l’on peut tomber du jour au lendemain en cas de disgrâce ?
Le 5 août le OUI l’emportera comme il a élu celui qui fit tomber un président élu.
L’atmosphère d’illusion démocratique avec des libertés officielles et des chaînes invisibles laisse croire qu’il existe une possibilité démocratique d’aller contre le pouvoir. Tout cela ne tient que parce qu’un homme, Aziz, a décidé de jouer à ce jeu démocratique comme un luxe qu'il peut se permettre. Sa chance est que son niveau intellectuel lui évite d'être sensible à la portée des mots, il ne s'intéresse qu'aux forces qui gouvernent le monde : l'argent et les armes. Pour lui ceux qui parlent n’ayant aucune arme ou aucun moyen d’affronter sa force militaire, ne comptent pas. Il donne ainsi à la tradition militaire mauritanienne depuis 1978, une leçon de domination pacifique.
Il n’est pas encore atteint du délire des tyrans qui ne supportent pas la critique publiquement sinon un mot de lui et ce régime qui semble si pacifique avec les civils, si civilisé se changerait en force de douleur et de larmes. Un seul mot suffirait pour faire de la Mauritanie le Tchad ; pays où les opposants disparaissent tout simplement sans que le premier responsable ne soit infréquentable nulle part.
Aziz n’a pas besoin de ça pour régner au contraire, il a besoin des gesticulations et des petites marches inoffensives des opposants pour donner à son régime la caution démocratique. Ainsi le parti du chef de file de l'opposition représente 16% à l'assemblée. Quand on voit comment on matraque les manifestants dans les grandes démocraties, quand on voit comment les policiers tuent impunément des noirs dans telle autre grande démocratie, qui pourra dire un mot si la répression chez nous devenait féroce ?
Et même si demain, le taux de participation est très faible, l’exemple d’un Macron élu malgré 60% d’abstention et de votes blancs sera là pour valider l’exercice sans rougir.
Avec ça, notre opposition tombe toujours dans les mêmes pièges qui font le jeu du pouvoir. Comment oser boycotter un référendum qui demande au peuple son avis ? N’est-ce pas plus respectueux du peuple et de la démocratie que de faire campagne pour le non massif ? C’est là où le bât blesse. L’opposition vieillissante, sans moyens financiers, sans accès aux médias de masse, sans rien qui puisse exalter les foules et faire croire à une victoire possible, cette opposition sait que sa survie ne réside plus que dans l’esbroufe et la figuration.
Elle oublie qu’elle s’adresse à un pouvoir militaire qui peut se permettre le luxe d’être civilisé mais au moindre danger, la force reprendra ses droits. Comment expliquer que pour Ould Mkheitir ou n’importe qui, on peut manifester devant la présidence mais quand il s’agit d’une marche de l’opposition, toute direction dans ce sens est interdite au risque de se prendre une balle ? D’ailleurs les opposants n’ont jamais tenté le diable et leurs marches vont dans tous les sens sauf celui de la présidence.
L’opposition sauf pour un petit nombre est devenue une activité pour occuper les journées de gens à la retraite. Ce n’est plus que ça sauf un petit nombre de jeunes qui osent encore aller sur le terrain ne serait-ce que pour tendre une banderole jusqu’à l’expérience de la prison qui en calme plus d’un ou le pousse à l’exil pour rejoindre les révolutionnaires du clavier dont les mots n’arrivent pas aux bras sur le terrain. Des mots mieux que rien devenus le refuge d’une conscience n’ayant plus prise sur le réel.
Des mots devenus le divertissement du pouvoir qui a appris à en jouer en s’abonnant aux comptes facebook les plus radicaux ou les plus créatifs pour sourire sans tirer aucun profit des bonnes idées qu'on peut y trouver. Pire que tout le pouvoir maîtrise désormais les canaux de désinformation pendant qu'aucune information digne de ce nom ne filtre. Pas un livre sur aucun groupe financier, ou militaire. Rien ! La Mauritanie étant le seul pays de la région à n'avoir aucune production en la matière qui ait pu remuer la république comme on le voit chez nos voisins. Preuve du niveau général, rien de sérieux, des commentaires...
De plus, la culture de l'impunité est telle que personne du pouvoir ne risque rien en Mauritanie, ni chaussure, ni œuf ni tarte à la crème. Quoi qu’ils disent, quoi qu'ils volent, je parle des civils, ils sont reçus partout avec respect. Toute l’opposition n’a qu’un mot à la bouche : Aziz ! En amnistiant tous les civils sans foi ni loi prêts à tout, même cautionner le parjure en république islamique de Mauritanie.
Si le chef est l’unique responsable, il ne faut pas s’étonner que les chefs passent et rien ne change dans l’articulation monarchique du pouvoir. On en vient à se demander si le parti unique ne serait pas la solution de sorte que les opposants éclairés aujourd’hui soient une mouvance à l’intérieur du pouvoir histoire ne pas laisser la place qu’à la garde rapprochée d’incapables.
En tout cas, la démocratie telle qu’elle est articulée actuellement est une machine infernale à perdre des milliards en élections gagnées d’avance avec en plus aucun débat sur le fond.
L’exemple du prochain référendum est le plus terrible. La constitution est bancale, nous l’avons prouvé mais c’est impossible à dire car des pères fondateurs sont du côté de l’opposition, il ne faut pas les humilier et le pouvoir trouve son compte dans ce silence à propos du français absent de la constitution comme le hassania, un conseil constitutionnel dont les attributs ne lui permettent pas de dire un mot à propos de l’usage de l’article 38, pas une fois le terme coran, ou prophète ou sunna dans la constitution de la république islamique de Mauritanie etc. etc.
L’hypocrisie et la mauvaise foi sont si généralisées au pouvoir et à l’opposition qu’ils préfèrent parler de la constitution comme de quelque chose de cohérent, de solide, de fondamental alors que c’est une chinoiserie faite à base de copier-coller dont 41 articles mot pour mot pris aux français à cela ils ont greffé l’article 38 algérien tyrannique qu'on ne retrouve que chez Sékou Touré !
Imposteurs ! Comment aller voter pour cautionner cette constitution arrivage digne d’indigènes lettrés incapables de bricoler avec cohérence ? Depuis 1991, l’article 38 est là, personne n’a jugé utile de le dénoncer sans parler du reste…
VLANE
VLANE